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mardi 21 mai 2024

Très probablement un nid de faucon pèlerin sur la tour de la Bourse malgré les travaux!

Depuis un peu plus de 2 semaines j'ai progressivement acquis la conviction que contre toute attente un couple de faucon pèlerin niche à nouveau sur la tour de la Bourse, malgré le retrait des boites de nidification et les travaux extérieurs actuellement en cours. De plus ce nid - qui n'est pas visible depuis le sol - contient très probablement des fauconneaux. La présence de ce nid - s'il est confirmé - pourrait possiblement avoir un impact sur les travaux en cours sur l'édifice, le faucon pèlerin bénéficiant toujours d'un statut de protection particulier au Québec (statut d'espèce vulnérable).  Un couple de faucon pèlerin a niché avec succès pendant de nombreuses années sur cet édifice en utilisant les boites de nidification (une simple caisse remplie de petits cailloux) mises à sa disposition. À ma connaissance, la dernière nidification réussie date de 2019, voir cet article pour un survol des nidifications de 2014 à 2019 et pour des informations sur ce qui s'est passé en 2020 et 2021. Les boites de nidification ont été retirées à l'automne 2021 en prévision de travaux extérieurs prévus sur l'édifice, de toute évidence ceux en cours actuellement (merci à Marilou Skelling d'Environnement Faucon pour l'information  sur le moment du retrait des boites de nidification).

Dernière heure: alors que j'écrivais cet article, 2 personnes travaillant à la tour de la Bourse ont publié des commentaires sur cette publication Facebook qui appuient la théorie de l'existence d'un nid avec présence de fauconneau. Merci à elles.

Cet article est organisé comme suit. Dans la première section je mentionne les observations suggérant une occupation quasi-permanente d'un secteur de la tour de la Bourse début mai, avec relais entre les 2 adultes. La 2ième section est consacrée à une période plus récente où les adultes sont davantage visibles (i.e., ne seraient plus constamment au nid présumé) mais où il y a arrivée de nourriture près du nid présumé. Dans la 3ième section je mentionne quelques autres aspects de la nidification: perchoirs de surveillance, défense territoriale. Finalement dans la dernière section j'aborde brièvement le possible conflit avec les travaux en cours.

Dans ce qui suit, par souci de concision j'omettrai l'adjectif ''présumé'' lorsque je parle du nid. L'existence du nid reste à confirmer hors de tout doute (par des biologistes ou des personnes autorisées). 


1. Localisation approximative du nid, présence quasi-permanente des faucons pèlerins avec relais

Localisation du nid

Le nid semble situé à peu près au même endroit que lorsque les faucons pèlerins nichaient sur l'édifice il y a quelques années, sur l'étage technique supérieur, sur la façade donnant sur la rue Saint-Jacques, voir la photo ci-dessous.
Localisation approximative du nid présumé

Terminologie: l'étage technique est divisé horizontalement en 3 parties que j'appelle tiers gauche, tiers milieu et tiers droit (le nid serait donc situé près de la jonction entre le tiers gauche et le tiers milieu). Chacun des 3 tiers de l'étage technique est divisé en intervalles par les cadres des fenêtres. Ces intervalles sont numérotés à partir de 1, par exemple ''2ième intervalle du tiers milieu''. Au niveau de l'étage technique j'appelle tiret la petite excroissance qui sépare 2 intervalles; ces tirets sont numérotés à partir de 1. L'extrémité d'un tiers n'est pas considérée comme un tiret, ainsi par exemple le 1er tiret du tiers milieu correspond à l'extrémité droite du 1er intervalle de ce tiers.

Comme indiqué dans cette publication Facebook le 1er mai j'avais observé en fin de journée un faucon pèlerin s'envoler du sommet de l'édifice de la Banque Royale en direction de la tour de la Bourse. S'il s'agissait de la femelle et qu'il y avait une nidification, il y avait des chances qu'elle se rendait à son nid puisque la femelle typiquement remplace le mâle au nid à ce moment de la journée pour assurer le quart de nuit. Convaincu que les faucons pèlerins ne pouvaient pas nicher sur la tour de la Bourse (retrait des boites de nidification, travaux, etc) j'ai pensé que le nid pourrait possiblement se trouver sur le toit de l'édifice EVO voisin. Mais le matin du 3 mai j'ai plutôt observé un faucon se rendre sur la tour de la Bourse à l'endroit identifié plus haut...
 

Surveillance vidéo du 3 mai

De 17h15 à 20h06 j'ai effectué depuis la rue Saint-Paul (située à environ 300 mètres de la tour de la Bourse d'après Google Maps) une surveillance vidéo de l'étage technique de la tour de la Bourse où serait situé le nid. L'enregistrement est typiquement interrompu puis redémarré toutes les 30 minutes environ pour éviter d'avoir des fichiers vidéo trop gros, ce qui résulte en de petits trous dans la surveillance d'une durée variant entre 2 et 7 secondes. Une plus longue interruption de 1mn13 a aussi été nécessaire pour changer la batterie. Les faucons pourraient théoriquement se déplacer sur l'étage technique sans être vus puis quitter l'édifice (ou y arriver) hors de vue de la caméra mais il n'y a aucune raison pour qu'ils se compliquent ainsi la vie. Les vidéos ont été examinées à vitesse x4 pour déterminer les arrivées ou départs. Ces précisions étant faites, la surveillance vidéo suggère une occupation permanente du secteur du nid pendant toute la durée de la surveillance. Voici les mouvements qui ont été observés:
  • À 17h59mn40 un oiseau devient visible sur le 1er tiret du tiers milieu puis disparait à 18h02mn32. Ce segment de la surveillance a démarré à17h45mn20 et s'est terminé à 18h14mn01 et aucun vol d'arrivée ou de départ n'a été enregistré, ce qui suggère que l'oiseau provient de l'étage.
  • À 19h47mn06 un oiseau arrive en vol et se perche dans le 8ième intervalle du tiers milieu. À 19h48mn05 il commence à se déplacer vers la gauche. À 19h48mn10 un 2ième individu devient visible au premier intervalle du tiers milieu et s'envole 4 secondes plus tard. À 19h48mn24 le 1er individu reprend sa marche vers la gauche et disparait à 19h48mn28 au niveau du 3ième intervalle. Voir la vidéo ci-dessous. Ce segment a commencé à 19h31mn07 et s'est terminé à 19h58mn34. 



Surveillance vidéo du 6 mai

J'ai effectué une autre surveillance vidéo le lundi 6 mai de 8h00mn25 à 11h16mn40, mais cette fois-ci depuis la rue Saint-Jacques un peu au sud de la tour. L'objectif était de vérifier si l'occupation quasi-permanente pouvait aussi être constatée quand les travailleurs étaient présents. Le même protocole que le 3 mai a été utilisé (en particulier segmentation des vidéos entrainant une interruption de quelques secondes de la surveillance). Voici les mouvements observés:
  • A 8h35mn58 un faucon pèlerin se perche en-dessous de la plateforme de chantier sur le coin Est de la tour; simultanément un faucon quitte le 1er intervalle du tiers milieu. À 8h38mn54 le faucon perché sur le mât s'envole puis à 8h39mn04 un faucon (probablement le même) arrive en vol et se perche dans le 5ième intervalle du tiers milieu. Cet individu disparait de vue à 8h39mn11. Voir la vidéo ci-dessous. Ce segment a commencé à 8h32mn18 et s'est terminé à 8h59mn55.
 

Surveillance vidéo du 10 mai

L'objectif de cette surveillance vidéo, effectuée depuis la rue Saint-Paul de 19h13mn25 à 20h11mn59, était de m'assurer que les faucons continuaient à être présents près du nid avant de partager sur Facebook mes observations des 3 et 6 mai. Cette surveillance vidéo a enregistré beaucoup de mouvements de 2 oiseaux, ce qui pourrait suggérer qu'une présence quasi-constante d'un adulte au nid n'était plus nécessaire.


2. Livraison de nourriture

Le 16 mai, après avoir observé le matin 4 accouplements de faucon pèlerin sur l'édifice SunLife situé à environ 700 mètres de la tour de la Bourse, j'ai décidé d'effectuer une autre surveillance vidéo de la tour de la Bourse depuis la rue Saint-Paul, de 18h36mn58 à 20h41mn25. Les faucons pèlerins continuaient à être présents près du nid - ce qui semblait exclure que c'était ce couple qui a été vu s'accouplant sur l'édifice SunLife - mais les faucons semblaient trop visibles pour qu'il y ait présence quasi-continuelle d'un adulte au nid. Dans un premier temps j'ai pensé que les biologistes avaient stoppé la nidification à cet endroit (comme cela a été fait au pont Laviolette récemment, voir par exemple cet article de Radio-Canada) en raison des travaux en cours. Puis j'ai réalisé que cela pouvait aussi signifier que le nid contenait maintenant des fauconneaux suffisamment âgés pour ne plus avoir besoin constamment de la présence d'un parent. Pour tester l'hypothèse de la présence de fauconneau il fallait que je documente l'arrivée de nourriture près du nid.

Après plusieurs tentatives infructueuses les 17 et 18 mai, c'est finalement le 19 mai vers 13h que j'ai réussi à documenter une livraison de nourriture en me postant à l'intersection des rues Notre-Dame et Gauvin. La proie a été apportée par le mâle au 2ième intervalle du tiers milieu, la femelle est aussitôt apparue au 1er intervalle et s'est emparée de la proie avant de disparaitre de vue.  À 13h12mn19 elle redevient visible et s'envole en emportant quelque chose avec elle, probablement les restants d'un repas. Sur place, pendant le présumé nourrissage j'ai perçu de faibles cris qui pourraient correspondre aux cris poussés par la femelle lors du nourrissage.

 

 

3. Autres indices de nidification

En plus de se rendre régulièrement au nid, les faucons pèlerins utilisent des perchoirs d'où ils peuvent surveiller les abords du nid ou pour attendre leur tour de garde au nid. Ces endroits incluent le sommet de l'édifice de la Banque Royale, le sommet du 622 Saint-Jacques et le mat de l’élévateur de chantier du coin Est.

J'ai également été témoin de comportements territoriaux: plusieurs alarmes apparemment provoquées par des passages d'urubus et au moins une série d'attaques contre ceux-ci, attaque d'un goéland passant trop proche du nid par un faucon pèlerin perché sur le mât du coin Est.

 

4. Les faucons pèlerins et les travaux

Lorsque j'étais présent, les travaux en hauteur sur la tour de la Bourse semblaient en apparence peu dérangeants pour les faucons pèlerins: les travailleurs se déplacent dans une cabine fermée jusqu'à la plateforme de travail située presque tout en haut de la tour; de plus cette plateforme de travail est largement fermée elle aussi. Il y a présentement une telle plateforme à 3 des 4 coins de l'édifice: les coins Nord, Est et Ouest. Un site web a été mis en place avec de nombreuses informations sur les travaux. 
 
Parmi les 3 coins de l'édifice où il y a des travaux, seul le coin Est appartient à la façade où se trouverait le nid. Lors de mes présences je n'ai pas eu l'occasion de voir de cabine monter le long du coin Est donc j'ignore quelle sera la réaction des faucons pèlerins mais je serais étonné s'ils ne réagissaient pas. La structure le long de la laquelle circulerait la cabine est par ailleurs utilisée par les adultes pour surveiller leur nid:
Faucon pèlerin surveillant de haut son nid, 17 mai

Les cabines qui circulent sur les coins Nord et Ouest ne devraient pas déranger significativement les faucons pèlerins mais ceux-ci les surveillent. Le 6 mai vers 7h45 un faucon pèlerin provenant possiblement du sommet de l'édifice de la Banque Royale a volé en direction d'une cabine qui était en train de descendre sur le coin Nord et s'est perché brièvement sur la structure en-dessous de la cabine, c'est-à-dire sur son chemin! 

Les années où les faucons pèlerins nichaient sur la tour de la Bourse, les fauconneaux exploraient d'autres façades de la tour que celle où ils sont nés, avant d'effectuer leur premier vol. On peut imaginer qu'ils apprendront par eux-mêmes ou de leurs parents à ne pas s'approcher des coins sur lesquels il y a des travaux, en particulier les coins Nord et Ouest.  Mais idéalement il serait souhaitable que les fauconneaux ne soient pas dérangés sur la façade où se trouve le nid lorsqu'ils commenceront à se promener et à exercer leurs ailes, de façon à éviter tout risque d'envol prématuré, source d'accident et de mortalité. Ceci pourrait se traduire par exemple par la mise sur pause des travaux sur le coin Est pendant une certaine période, le temps que les fauconneaux apprennent à voler, mais d'autres mesures pourraient être prises.




lundi 13 mai 2024

A propos des mouches Carnus et de leur infestation du nid de faucon pèlerin de l'Université de Montréal

Depuis 2020 le couple de faucon pèlerin qui niche à l'Université de Montréal est affecté par une infestation de mouches mangeuses de sang qui a couté la vie à 2 fauconneaux en plus de possiblement détériorer la santé d'au moins un 3ième fauconneau et qui a entrainé plusieurs interventions humaines au nichoir pour tenter de limiter les dégâts. La mouche en question a été identifiée comme appartenant au genre Carnus. Cet article apporte quelques éléments d'information sur cette mouche à l'aube d'un possible nouvel épisode.

Organisation de l'article. Je commence par donner dans la section 1 quelques informations en bref sur la mouche. Je rappelle ensuite les épisodes d'infestation du nid de faucon pèlerin de 2020 à 2023 à l'Université de Montréal et (peut-être) à l'Oratoire Saint-Joseph. La section 3 est consacrée à une justification des affirmations faites dans la section 1 et à d'autres informations plus pointues sur la mouche. Finalement dans la section 4 je propose deux explications possibles pour l'infestation de mouche à l'Université de Montréal et j'explique pourquoi ce pourrait être préférable de ne pas intervenir et de laisser faire la nature. 

Remerciements: mes remerciements vont d'abord à Eve Belisle pour ses réponses à mes nombreuses questions et pour ses importantes contributions, dans le cadre de Faucons de l'UdeM qu'elle a créé, aux nidifications du faucon pèlerin à l'Université de Montréal via la mise en place de nichoirs et le partage des images par un système de caméras. Merci également au docteur Guy Fitzgerald de l'UQROP, à Jo-Annie Gagnon du Nichoir et à Marilou Skelling d'Environnement Faucon pour leurs réponses à mes questions.


1. En bref

  • La mouche Carnus Hemapterus, principal représentante du genre Carnus et la plus étudiée, mesure jusqu'à 2 mms et se présente à l'âge adulte sous 2 formes: une forme ailée et une forme non-ailée.  Les ailes seraient perdues après que l'adulte ait trouvé des oisillons dont il peut se nourrir du sang. Les femelles pondent des œufs dans le nid. Les larves passent l'hiver dans le nid où ils se nourrissent de débris organiques. La transformation de la larve en mouche adulte coïncide avec la naissance des oisillons. Les mouches disparaissent lorsque les plumes commencent à apparaitre chez les oisillons.
  • Les mouches atteindraient un nid de différentes façons: en naissant sur place d’œufs pondus l'année précédente, en arrivant en vol depuis l'extérieur ou en voyageant sur des proies. Il ne semble pas que les mouches soient transportées par les parents..
  • Les excréments des mouches sur les œufs favorisent le développement de bactéries dont certaines peuvent pénétrer à l'intérieur de l’œuf et causer la mort de l'embryon .
  • Le Nichoir, qui prend soin des oiseaux sauvages malades ou orphelins dans la région de Montréal  en vue de les retourner dans la nature (à l'exception de 2 catégories d'oiseau: les oiseaux de proie qui sont gérés par l'UQROP, et les pigeons) est familier avec un parasite correspondant à la description de la mouche Carnus (qui ne semble cependant pas avoir été formellement identifié en tant que tel), tant sous sa forme ailée que non-ailée (cette dernière forme est appelée 'mite' par Le Nichoir). Ce parasite est trouvé sur des oisillons apportés au refuge lorsque le nid a été accidentellement détruit et sur de jeunes oiseaux apprenant à voler et recueillis au sol. Ce parasite est surtout vu sur des étourneaux (formes ailée et non-ailée) mais les mites sont aussi rencontrées chez les cardinaux, merles et quiscales (cette liste a été donnée de mémoire et n'est donc possiblement pas exhaustive; à noter que comme les pigeons ne sont pas admis au Nichoir, on ne sait pas si cette proie très appréciée des faucons pèlerins est affectée par ce parasite). Un grand merci à Jo-Annie Gagnon, coordonnatrice des soins aux oiseaux au Nichoir, pour avoir pris le temps de répondre à mes questions. 
  • D'après le docteur Guy Fitzgerald de l'UQROP la mouche qui a infesté les fauconneaux à l'Université de Montréal est du genre Carnus mais en date de juin 2020 il restait à confirmer qu'il s'agissait de l'espèce Carnus Hemapterus. Il semble que le cas de l'Université de Montréal était le premier où ce parasite a été observé par la Clinique des oiseaux de proie (d'après Eve Belisle qui a beaucoup échangé avec le docteur Fitzgerald à ce sujet). (La mouche Carnus est cependant connue pour infester des nids de faucon pèlerin sur la côte est des États-Unis, voir cet article de mon blogue pour plus de détails.)

 

2. Rappel des évènements à l'Université de Montréal: 2020-2023

2020

Eve n'étant pas baguée il y aura toujours un léger doute sur son identification - d'autant que son mâle Éole (né en 2011 sur la tour de l'Université de Montréal et bagué) a eu une relation avec au moins 2 femelles différentes - mais il semble que la relation Éole/Eve ait débuté en 2014 à l'incinérateur des Carrières, voir cet article du blogue d'Eve Belisle (le nom d'Eve choisi par Richard Dupuis pour la femelle d'Eole ne s'était pas encore imposé). À l'automne 2014 Eole remplace son père Roger à l'Université de Montréal et a dès lors 2 compagnes: Eve et sa mère Spirit. En 2015 Eve et Eole mènent 4 fauconneaux à l'envol à l'église Saint-Marc et en 2016 2 fauconneaux à l'incinérateur des Carrières. En 2017 Eve parvient à chasser Spirit de l'Université de Montréal et devient la seule femelle d'Éole. En 2018 le couple Eve/Eole amène pour la première fois 4 fauconneaux à l'envol à l'Université de Montréal. Puis 4 autres en 2019.
 
Eole est vu pour la dernière fois par une caméra de Faucons de l'UdeM le 5 avril 2020 vers 9h du matin. Le 6 avril au matin un nouveau mâle - baptisé Sphinx - accompagne Eve jusqu'au nichoir. Le 7 avril à 18h30 Eve pond son premier œuf, voir cet article pour plus de détails. Au total 3 œufs seulement seront pondus avec des écarts inhabituellement longs entre les différents œufs. Dans un premier temps Sphinx ne participe pas à la couvaison, ce qui résulte en plusieurs périodes de plus de 2 heures où les œufs ne sont pas couvés;  ce n'est que le 25 avril que Sphinx commence vraiment à couver, voir cet article pour plus de détails.

À la surprise de beaucoup, malgré ces importantes perturbations de la couvaison, les 3 œufs éclosent les 23 et 24 mai! La dernière éclosion est particulièrement longue et difficile (œuf partiellement écrasé, sang visible), voir cet article

Lors de leurs premiers repas les fauconneaux peinent à rester debout; de plus des tâches noires sont visibles sous leurs ailes. Dans l'après-midi du 27 mai des mouches sont aperçues (voir cette vidéo de Faucons de l'UdeM). En concertation avec la Clinique des oiseaux de proie, une intervention est programmée pour le lendemain matin mais il est trop tard pour le dernier-né, qui affaibli par sa difficile éclosion, est décédé durant la nuit ou tôt le matin. Le cadavre et les 2 survivants ont été amenés à la Clinique des oiseaux de proie par Eve Belisle. Les 2 fauconneaux encore vivants ont été traités à la Clinique puis replacés dans le nichoir l'après-midi du même jour. Un 2ième traitement a été administré aux fauconneaux sur la tour-même le lendemain. Voir cet article pour plus de détails.

Après avoir éte bagués le 16 juin et reçu par la même occasion un autre traitement contre les mouches, les 2 fauconneaux - 2 femelles baptisées Vanadis et Donna - ont effectué leurs premiers vols entre le 30 juin et le 9 juillet. Elles ont cessé d'être observés dans le voisinage du nid vers la mi-août - début septembre  (ce qui est tout à fait normal).

2021

En 2021 à la surprise générale le couple de faucon pèlerin choisit d'aller nicher dans un ancien nid de corbeau à l'Oratoire Saint-Joseph. Cela faisait quelques années que l'on voyait l'un ou l'autre des faucons dans l'un de ces nids de corbeau mais jusqu'à là le couple était toujours venu nicher sur la tour de l'Université de Montréal. Le 7 avril s'est produit une cassure brutale: les faucons ont brusquement cessé de fréquenter l'Université de Montréal et n'étaient plus que visibles à l'Oratoire Saint-Joseph où ils ont finalement niché. Dans cet article je passe en revue différents facteurs qui pourraient éclairer la décision du couple de déménager (un de ces facteurs est ce qui aurait pu être vu par le couple comme une prédation réussie par les humains sur un fauconneau qui était en réalité déjà mort mais ce n'était probablement pas le seul facteur).
 
Puisque ce nid n'était pas suivi par caméra on sait peu de chose sur cette nidification, sinon que 2 fauconneaux seulement ont atteint le stade où ils étaient visibles depuis le sol. On ignore en particulier combien d’œufs ont été pondus, combien ont éclos et ce qui est arrivé aux éventuels fauconneaux en surnombre. Un des 2 fauconneaux était un mâle (baptisé Jean en l'honneur de Me Jean Masson qui durant sa vie était fortement impliqué dans la protection des fauconneaux nés sur la tour de la Bourse) et l'autre une femelle (baptisée Jacinthe). Seul le mâle a pu être bagué, en profitant qu'il s'est retrouvé au sol à l'occasion de son premier vol.
 
Fait remarquable: Jean s'est fracturé par 2 fois une aile! Il a été trouvé au sol blessé une première fois à Montréal pas très loin du nid le 29 juillet puis près d'Utica dans l'état de New-York le 8 novembre, voir cet article. Il a à chaque fois été soigné puis relâché.

Il n'est pas clair si les mouches ont perturbé la nidification cette année-là mais on peut remarquer 2 choses potentiellement suspectes dans cette nidification:
  • Faible nombre de fauconneaux. Ce nombre contraste avec la production d'Eve lors des 3 années précédentes: 4 fauconneaux en 2018 et en 2019, 3 fauconneaux en 2020 (seulement 3 œufs avaient été pondus cette année-là, possiblement à cause du changement de mâle qui a coincidé avec le début de la ponte; un des fauconneaux est mort peu de temps après sa naissance). Ce faible nombre pourrait être attribuable à une autre cause que les mouches, par exemple à une difficulté d'adaptation au nouveau type de nid (mais Eve avait eu 4 fauconneaux lorsqu'elle avait niché dans un endroit assez similaire à l'église Saint-Marc en 2015) ou à de la prédation. Mais on ne peut pas exclure que ce faible nombre soit attribuable à un ou plusieurs  décès causés par les mouches comme en 2020 et en 2023.
  • Le double accident de Jean. La première année est difficile pour les jeunes faucons pèlerins et une proportion non négligeable n'y survit pas.  Les juvéniles peuvent être victime d'accidents, être tué par un autre oiseau de proie, mourir de maladie ou tout simplement mourir de faim faute d'avoir su développer une bonne technique de chasse.  Les chances de retrouver un faucon pèlerin blessé ou décédé sont a priori faibles compte tenu qu'il peut se retrouver à un endroit peu fréquenté (comme par exemple un toit) et/ou être rapidement mangé par un autre animal. Les 2 accidents de Jean pourraient s'expliquer par le destin normal des jeunes fauconneaux, doublé de la chance d'avoir été par 2 fois trouvé par un bon Samaritain. Mais on ne peut pas totalement exclure que Jean souffrait d'une fragilité quelconque (d'ordre neurologique ?) qui aurait pu résulter de l'exposition à des mouches ou aux bactéries qui les accompagnent et qui l'aurait rendu plus susceptible d'être victime d'un accident.
D'après Eve Belisle, au moment du baguage de Jean, les mouches n'ont pas été spécifiquement recherchées mais l'examen de routine n'a rien révélé d'anormal.

2022

Le 21 mars 2022 Sphinx est remplacé par un nouveau mâle après une courte bataille dans le nichoir 1.  Ce nouveau mâle est baptisé Miro, voir cet article de blogue pour plus de détails.

Du 16 au 23 avril 2022 Eve pond 4 œufs dans le nichoir 1. Entre le 25 et le 27 mai 3 des 4 œufs éclosent. Le baguage (et la mesure du poids qui vient avec) effectués le 17 juin révèlent que les fauconneaux sont 2 femelles et un mâle, nommés Véga, Mira et Sirius. Quelques mouches ont été trouvées sur les fauconneaux à cette occasion mais l'infestation était beaucoup plus modérée qu'en 2020 et en 2023, en particulier il n'y a eu ni décès ni nécessité de traiter les fauconneaux.
 
Les fauconneaux effectuent leurs premiers vols à partir du 3 juillet et sont tous capables de remonter sur la tour le 9 juillet, voir cet article pour plus de détails.  Malheureusement le 20 août Faucons de l'UdeM annonçait que le corps de Mira avait été trouvée sans vie au fond de la grande cheminée de l'École Polytechnique, voir aussi cet article.


2023 

Le 22 octobre 2022, Miro est remplacé par un nouveau mâle, baptisé Monsieur ou tout simplement M. Le 16 avril 2023 Eve pond le premier de 4 œufs dans le nichoir 2. C'est la première fois qu'une nidification a lieu dans ce nichoir.

Sur les 4 œufs pondus, seulement 2 éclosent, le 28 mai. C'est la première fois qu'autant d’œufs n'éclosent pas à l'Université de Montréal dans des circonstances en apparence normales (en particulier il n'y a apparemment pas eu d'interruption significative de la couvaison). Lorsque examinés par mirage à la Clinique des oiseaux de proie, les 2 œufs non éclos ne montraient aucun développement embryonnaire.  

Le 31 mai un des fauconneaux décède. Les mouches Carnus sont identifiées comme la cause probable du décès dans cette publication Facebook de Faucons de l'UdeM, qui indique en outre que le 2ième fauconneau semble aussi atteint: difficulté à se tenir debout, taches noires sous les ailes.

Le 2 juin, une intervention est effectuée par Faucons de l'UdeM pour débarrasser le fauconneau survivant de ses mouches et le nourrir. Le fauconneau reprend du mieux suite à cette intervention.
 
Le 17 juin Faucons de l'UdeM annonce sur Facebook que le fauconneau souffre d'une anomalie de la croissance des ailes. Possiblement en raison de cette anomalie, le fauconneau perd la vie le 4 juillet lors d'une chute d'une vingtaine d'étages.

Pour plus de détails sur cette nidification 2023, voir cet article de blogue.



3. Plus sur Carnus Hemapterus

La fin de cette section contient une courte liste de publications qui sont référencées dans les sous-sections suivantes.

Généralités

D'après Wikipédia [6] le genre Carnus est composé de 5 espèces de mouches, toutes des parasites d'oiseau.  L'espèce Carnus Hemapterus est la seule du genre Carnus à être largement répandue en Europe et dans les régions froides et tempérées d'Asie et d'Amérique du Nord d'après Wikipédia [7]. Carnus Hemapterus est aussi la plus étudiée. Le premier point de la section 1 de cet article provient en grande partie de Wikipédia [7].  Le fait que la mouche perd typiquement ses ailes après avoir trouvé un hôte est mentionné par Valera et al.  [3].  
 
Une photo en gros plan d'une mouche Carnus prélevée sur un fauconneau en 2020 a été publiée par le Dr. Fitzgerald en commentaire de cette publication Facebook de Faucons de l'UdeM (rappelons que cette mouche mesure autour de 1,5mm). 

Quelle est la durée de vie d'une mouche ?

Veiga et al. [9] ont déterminé que la durée de vie moyenne d'une mouche Carnus Hemapterus (depuis le moment où la larve s'est transformée en mouche) est d'environ 55 heures, mais c'était en l'absence de leur nourriture préférée, c'est-à-dire d'oisillon gorgée de sang. On peut imaginer plus généralement que les mouches décèdent lorsque leur nourriture devient inaccessible, c'est-à-dire lorsque les oisillons acquièrent leur plumage. En effet, comme les mouches ont perdu leurs ailes, elles peuvent difficilement chercher une autre source d'alimentation, et de toute façon les oisillons ne sont présents qu'à certains mois de l'année. Par contre si on considère l'ensemble du cycle de vie de la mouche, elle pourrait survivre sous forme de larve pendant plusieurs années si le nid d'oiseau n'est pas utilisé. 

Comment les mouches colonisent-elles un nid ?

Une partie des mouches trouvées dans un nid d'oiseau est constituée de celles qui y sont nées. Mais pour cela il fallait qu'il y ait des mouches l'année précédente pour pondre les œufs. Pour coloniser un nouveau nid, les mouches arriveraient soit sur des proies, soit en volant. Poulin [2] écrit ''Les immigrants trouvent les sites de reproduction de leur hôte en volant ou en étant transportés sur les proies, mais probablement pas en s'accrochant aux chouettes adultes, car ces mouches n'ont toujours été trouvées que sur des oisillons [3 références omises]'' (d'après Tomas et al [8], au moins chez certaines espèces d'oiseau, Carnus Hemapterus se nourrirait aussi sur l'oiseau couveur; mais l'adulte serait alors plus une victime collatérale de l'infestation que sa cause). Incidemment la réponse du Nichoir semble confirmer que ces mouches ne s’intéressent qu'aux oisillons ou aux jeunes oiseaux qui viennent de quitter le nid. Dans sa recherche, Poulin [2] a constaté que le nombre de mouches ailées restait constant durant la nidification des chouettes, malgré qu'une partie de ces mouches perdent leurs ailes, ce qui indique que la population ailée est continuellement alimentée soit par des larves nées sur place et qui se métamorphosent en mouche, soit par l'arrivage par la voie des airs de mouches venues de l'extérieur.

La gravité d'une infestation déterminée par la génétique des parents oiseaux ?

Tout comme certains humains se font plus piquer que d'autres par les maringouins, les individus oiseau ne seraient pas égaux face aux mouches Carnus. Une intrigante étude par Roulin et al. [1] suggère que chez l'effraie des clochers, le nombre de mouches trouvées sur les oisillons (et donc l'intensité de l'infestation) varie en fonction de si le nichoir était utilisé ou pas l'année précédente mais aussi en fonction de la proportion de noir sur le plumage de la femelle! (le plumage de l'effraie des clochers varie de blanc immaculé à fortement taché de noir; de plus la femelle est la seule à couver les œufs et les oisillons). Plus la femelle est tachetée, moins il y a de mouches sur les oisillons et moins ces mouches sont fécondes. Selon les auteurs qui s'appuient sur des études similaires, les ornements des oiseaux (dans ce cas-ci, la proportion de tâches noires dans le plumage de la femelle) fourniraient aux partenaires potentiels des informations sur la santé d'un individu (dans ce cas-ci la résistance aux parasites) et les aideraient à décider s'ils veulent former ou non un couple avec cet individu. De plus il a été montré que ces traits sont héritables génétiquement parlant.
 

Un produit anti-mouches sécrété par les plumes de certains oiseaux ?

Pour expliquer que certaines chouettes ont un nombre plus réduit de mouches sur leurs oisillons, il a été spéculé que les plumes de certains individus contiendraient une substance toxique pour les mouches. Dans [2] Poulin écrit ''Un test simple de cette hypothèse serait de mesurer las survie et le succès de reproduction des mouches en présence et absence de plumes, car il a été proposé que celles-ci contiennent des substances toxiques pour les ectoparasites (Winkler, 1993)''. L'article cité (Winkler [5]) étudie l'hirondelle bicolore qui a la particularité d'inclure dans son nid des plumes d'autres oiseaux. Winkler.a constaté que dans les nids où ces plumes étaient retirées, les oisillons avait une croissance moins rapide et étaient davantage infestées par des parasites. S'il est vrai que les plumes de certains oiseaux contiennent une substance toxique pour les mouches, on peut imaginer que la production ou non de cette substance (ou son intensité) est déterminée par la génétique de l'oiseau.
 

Effet indirect des mouches sur le développement embryonnaire

Les mouches Carnus Hemapterus pourraient avoir un effet indirect nuisible aux fauconneaux avant même leur naissance. En effet des études citées par Wikipédia [7] (l'une d'elles est Tomas et al. [8]) ont montré que les excréments des mouches sur les œufs favorisent le développement de bactéries, qui à cause de la porosité de l’œuf peuvent pénétrer à l'intérieur et s'attaquer à l'embryon.

Références

Carnus Hemapterus fait l'objet de nombreux articles scientifiques. Pour donner une idée de leur nombre, une recherche effectuée le 4 mai 2024 dans Google Scholar avec le mot-clé ''Carnus Hemapterus'' a donné 549 résultats: il n'était évidemment pas question pour moi de tout lire! Voici quelques articles que j'ai soit lu, soit simplement parcouru le résumé. Les références sont données sans ordre particulier.
  • [1] A. Roulin, C. Riols, C. Dijkstra et A.-L. Ducrest: ''Female plumage spottiness signals parasite resistance in the barn owl (Tyto alba)'', Behavioral Ecology vol. 12 No. 1: 105-119 (2001)
  • [2] A. Roulin: ''Cycle de reproduction et abondance du diptère Carnus Hemapterus dans les nichées de chouettes effraies Tyto alba'', Alauda, revue internationale d'Ornithologie vol. 66 (4) 265-272 (1998). Fichier .pdf disponible sur le site ''The diptera Site'' à ce lien.
  • [3] F. Valera, A. Cassa-Crivillé and H. Hoi: ''Interspecific parasite exchange in a mixed colony of birds'', The Journal of Parasitology' vol. 89 (2) 245-250 (2003)
  • [4] Danks HV. ''LONG LIFE CYCLES IN INSECTS'', The Canadian Entomologist. 1992;124(1):167-187. doi:10.4039/Ent124167-1 
  • [5] D. W. Winkler: ''Use and importance of feathers as nest lining in Tree Swallows (Tachycineta bicolor)'', The Auk vol. 110 (1): 29-36 (1993)
  • [6] Wikipédia: ''Carnus (fly)''. Lien (en anglais, cet article n'est pas disponible en français)
  • [7] Wikipedia: ''Carnus Hemapterus''. Lien (en anglais, cet article n'est pas disponible en français).
  • [8] G. Tomas, D. Martin-Galvez, C. Ruiz-Castellano, M. Ruiz-Rodriguez, J.M. Peralta-Sanchez, M. Martin-Vivaldi, j.j. Soler: ''Ectoparasite activity during incubation increases microbial growth on avian eggs'', Microbial ecology vol. 76 p. 555-564 (2018)
  • [9] J. Veiga, E. Moreno, J. Benzal et F. Valera: ''Off-host longevity of the winged dispersal stage of Carnus Hemapterus (insecta: diptera) modulated by gender, body size and food provisioning'', Parasitology vol 146 p. 241-245 (2018).
     


4. Discussions

4.1. Première théorie pour la cause de l'infestation à l'Université de Montréal: un ou les 2 adultes ont une mauvaise résistance génétique face cette mouche

Cette théorie est basée sur l'observation que l'intensité de l'infestation et la fécondité des mouches semblent dépendre de la génétique de la femelle chez l'effraie des clochers. Je suppose ici que quelque chose de similaire se passe chez le faucon pèlerin. Pour simplifier, je suppose de plus que le mécanisme à l’œuvre est la présence d'une substance toxique pour les mouches dans les plumes (c'est une hypothèse qui est envisagée mais qui n'est pas prouvée), la production de cette toxine dépendant de la génétique. La toxine ne tuerait pas nécessairement les mouches mais les rendrait moins efficaces et nuirait à leur reproduction.

Contrairement à l'effraie des clochers, chez le faucon pèlerin le mâle et la femelle couvent tous les deux les œufs et les oisillons. Si les 2 parents secrètent la toxine, l'effet protecteur contre les mouches sera maximal et on peut imaginer que toutes les mouches seront neutralisées car constamment en contact avec la toxine. Si un seul parent sécrète la toxine, les mouches pourraient reprendre du mieux lorsque l'autre parent - celui qui ne sécrète pas la toxine - prend place dans le nid: dans ce cas il pourrait soit y avoir aucun effet des mouches sur les fauconneaux, soit un effet modéré. Si aucun des adultes ne sécrète la toxine, les mouches ont le champ libre et les effets négatifs sur les oisillons seront maximaux. Je vais essayer d'argumenter que les 2 membres du couple actuel pourraient ne pas sécréter la toxine. Pour cela, examinons les différents faucons pèlerins adultes impliqués:

Eve

C'est la femelle du couple actuel. Rien n'indique qu'il y a eu un problème de mouche dans ses nidifications jusqu'à l'arrivée de Sphinx en 2020. En 2018 et 2019, Eve a niché sur la tour de l'Université de Montréal sous l’œil des caméras et ses juvéniles ont été examinés lors de leur baguage sans qu'aucune anomalie ne soit constatée. En 2015 (sous la réserve habituelle qu'il n'y a pas eu d'erreur d'identification) elle a amené à l'envol 4 fauconneaux à l'église Saint-Marc. De 2015 à 2019, son mâle était Eole, fils de Spirit (il est intéressant de noter que les nidifications de Spirit ne semblent pas non plus avoir été impactées par les mouches). Se pourrait-il que ce soit Éole qui ait protégé les fauconneaux d'Eve contre les mouches ?
 

Sphinx et M

Les 2 infestations sévères de 2020 et 2023 ont eu lieu sous le règne des mâles Sphinx et M respectivement. Il est intéressant de noter qu'avant l'infestation de 2023, Eve Belisle était d'avis que M était Sphinx; cependant comme il n'y avait pas consensus au sein de l'équipe, un nouveau nom a été donné au mâle. Que M et Sphinx soient ou non 2 individus distincts ne change finalement pas grand chose: les 2 mâles pourraient ne pas produire la toxine.
 

Miro

C'était le mâle du couple en 2022. Lors du baguage des fauconneaux, des mouches ont été trouvées sous leurs ailes mais l'infestation était beaucoup moins sévère qu'en 2020 et 2023, en particulier aucune intervention au nichoir n'a été nécessaire.
 
 
Il parait donc possible que Eve, Sphinx et M ne secrètent pas de toxine contre ces mouches, contrairement à Eole et à Miro. Si cette théorie est correcte, on peut espérer une amélioration de la situation lors du prochain changement dans la composition du couple, que ce changement concerne le mâle ou la femelle. Pour simplifier j'ai raisonné en termes de toxine générée par les plumes mais ce raisonnement peut s'étendre à d'autres mécanismes anti-parasitaires.


4.2. Deuxième théorie pour la cause de l'infestation à l'Université de Montréal: infestation des nombreux nids d'étourneaux près des nichoirs de faucon pèlerin

Selon cette théorie, les mouches Carnus auraient commencé par infester les nombreux nids d'étourneaux du pavillon Roger Gaudry non loin du nichoir puis les mouches auraient ''découvert'' le nid de faucon pèlerin (il n'est pas clair comment cette information se transmettrait d'une année à l'autre mais si les mouches sont présentes en grand nombre il est inévitable que certaines découvrent les fauconneaux; il est possible aussi que le nettoyage des nichoirs à l'automne ne parvienne pas à tuer tous les œufs/larves de mouches). Cette théorie s'appuie sur le fait que d'après la littérature scientifique les nids d'étourneaux semblent être particulièrement infestés par ces mouches, une information que semblent confirmer les données du Nichoir. Si cette théorie est correcte, la mauvaise nouvelle est que ces mouches sont probablement là pour rester, du moins tant qu'il n'y a pas de travaux d'envergure pour refaire les façades dans ce secteur (une lueur d'espoir est que l'Université de Montréal semble actuellement engagée dans de tels travaux dans d'autres secteurs du campus). 
 
Un point faible de cette théorie est que si le nombre réduit de fauconneaux à l'envol à l'Oratoire Saint-Joseph a été causé par les mouches, cette théorie n'explique pas leur présence là-bas. Il faudrait aussi accepter la coïncidence entre le remplacement d'Éole par Sphinx et la découverte du nid de faucon pèlerin par les mouches (à moins que les mouches aient ''senti'' le sang du fauconneau qui a eu de la difficulté à éclore ?)


4.3. Quelques arguments en faveur d'une non-intervention

Les fauconneaux qui naissent sur la tour de l'Université de Montréal ont la particularité de se retrouver dans un grand nombre de foyers via les écrans, ce qui crée envers eux un attachement bien compréhensible.  Mais il n'en reste pas moins que ce sont des animaux sauvages. Et si au Québec on peut être puni pour des mauvais soins à un animal de compagnie, pour les animaux sauvages  la loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune stipule que ''Nul ne peut déranger, détruire ou endommager le barrage du castor ou les œufs, le nid ou la tanière d’un animal'' (c'est moi qui souligne). Des exceptions sont prévues par la loi mais à ma connaissance aucune ne permet à un particulier d'intervenir sur un nid sous prétexte qu'il s’inquiète pour ses occupants: une autorisation du Ministère est nécessaire. Le cas du nid de faucon pèlerin de l'Université de Montréal est un peu spécial puisqu'il semble que les interventions - toujours effectuées en consultation avec des experts - soient tolérées par le Ministère. Je pense néanmoins que c'est une situation où il faudrait laisser faire la nature et je présente quelques arguments en ce sens.   
  • Une intervention sans l'autorisation explicite du ministère, qui plus est à un nid aussi médiatisé que celui de l'Université de Montréal, transmet le message erroné que n'importe qui peut intervenir sur un nid à partir du moment où il a des inquiétudes sur la santé de ses occupants. Cela peut mettre d'autres nids - et pas seulement de faucon pèlerin - à risque de dérangement par des personnes pensant bien faire.
  • Une intervention ne garantira pas nécessairement la bonne santé des fauconneaux comme l'a montré tristement ce qui s'est passé en 2023. Les fauconneaux pourraient déjà avoir des dommages résultant de l'anémie provoquée par les mouches au moment où l'intervention est effectuée. Une solution pourrait être une intervention préventive avant que les symptômes soient constatés mais une telle intervention a davantage de chance de nécessiter une autorisation explicite du ministère; ne pas oublier non plus que les bactéries favorisées par les déjections des mouches pourraient avoir affecté les fauconneaux alors qu'ils étaient encore dans leur œuf.
  • Un fauconneau qui survivrait grâce à l'intervention humaine pourrait avoir hérité du bagage génétique favorisant ces mouches (surtout si ses 2 parents ont le ''mauvais'' gène), ce qui pourrait condamner ses petits à lui s'il forme un couple. Autrement dit, on ne peut pas exclure que le drame qui se joue dans le nichoir est un mécanisme de sélection naturelle destiné à renforcer la protection de la population de faucon pèlerin face à ce parasite en limitant la descendance d'individus mal armés génétiquement pour lutter contre lui.
  • Les parents faucon pèlerin ne semblent pas totalement dépourvus face à ces mouches. Par exemple dans cette vidéo publiée par Faucons de l'UdeM on voit le mâle donner de petits coups de bec sur le corps d'un fauconneau nouveau-né, il n'est donc pas inconcevable que les adultes puissent retirer eux-même des mouches. Encore faut-il qu'ils réalisent que les mouches sont le problème. Or à l'Université de Montréal jusqu'à présent, à chaque fois qu'il y a eu décès d'un fauconneau à cause des mouches, des êtres près de 1000 fois plus grand que les mouches ont fait irruption au nichoir: on pourrait comprendre que les faucons pèlerins aient du mal à réaliser que ceux sont les petites mouches qui sont le problème! Il est malheureusement possible qu'une ou plusieurs saisons sans aucun fauconneau survivant soient nécessaires. Ces échecs pourraient possiblement aussi entrainer la dissolution du couple puis la formation d'un nouveau couple, ce qui pourrait être une autre façon de régler le problème si la théorie 1 est correcte.
  • Les faucons pèlerins attrapent occasionnellement des insectes, même si on peut penser qu'ils les préfèrent en vol et de taille plus grosse que la mouche Carnus. 
  • L'irruption au nid d'humain dans la phase la plus critique de la nidification, celle où il y a des fauconneaux sans défense, pourrait potentiellement avoir pour effet d'inciter le couple de faucon pèlerin à chercher un endroit plus sécuritaire où nicher. En allant nicher à l'Oratoire Saint-Joseph en 2021, Eve a démontré qu'elle avait cette capacité à trouver un endroit alternatif. (Il est parfois question d'alternance entre des sites de nidification mais cette alternance se manifeste à mon avis surtout pour les sites naturels où le nid est attaquable par des prédateurs terrestres. Si le couple de faucon pèlerin trouve un endroit sécuritaire où nicher, je ne vois pas de raison pourquoi il ne l'utiliserait pas à nouveau les années suivantes et c'est d'ailleurs ce qui s'est passé pour la tour de l'Université de Montréal jusqu'en 2020). Si Eve décidait de nicher ailleurs qu'à l'Université de Montréal, il est possible que l'on perde pour longtemps la capacité à suivre par caméra leur nidification (rappelons que les faucons pèlerins ne sont pas revenus nicher à l'Université de Montréal par choix en 2022 mais parce que des travaux se déroulaient sur la façade de l'Oratoire Saint-Joseph où ils avaient niché en 2021).

 

4.4. Divers

  • L'apport d'une proie dans le nichoir par un adulte (généralement un mâle) pourrait aussi potentiellement contribuer au problème. Le 26 avril 2020 Sphinx a par exemple trainé une proie sur les œufs comme s'il voulait les nourrir (source: vidéo Youtube de Faucons de l'UdeM partagée sur la page Facebook de Faucons de l'UdeM). Je me souviens avoir lu sur le clavardage de la caméra de Faucons de l'UdeM plus tôt cette année une phrase qui suggère que M aurait aussi amené une proie dans le nichoir, quoique avant la ponte des œufs. J'ignore comment se comportaient Miro et Éole à ce propos (Eole avait amené une proie dans le nichoir le 26 avril 2017 au moment où il y avait déjà des œufs mais c'était dans le contexte très particulier où ses 2 femelles se battaient dans le nichoir; on ne peut pas totalement exclure que l'apport de proie était relié à cet évènement exceptionnel). Je ne pense pas cependant que l'apport de proie dans le nichoir ait un effet très important sur la population de mouches: il faudrait déjà que la proie soit un juvénile et qu'elle soit infestée de mouches (non ailées puisque les mouches ailées pourraient de toute façon facilement se déplacer depuis la corniche où les proies sont mangées); de plus rappelons que seuls les adultes se nourrissent du sang des oisillons et qu'un œuf de mouche met 1 an à donner une mouche adulte: il ne peut donc pas y avoir d'explosion du nombre de mouches suite à l'apport de quelques unes sur une proie. Par contre l'apport d'une proie dans le nichoir avant la naissance des oisillons pourrait y amener des bactéries et autres pathogènes qui eux pourraient se multiplier rapidement et ultimement aggraver les effets de l'infestation de mouches.
  • Une question sans réponse est si la non-éclosion de 2 œufs en 2023 pourrait s'expliquer par une mort embryonnaire possiblement causée par des bactéries favorisées par la présence des mouches. Le 5 juin 2023, Faucons de l'UdeM a écrit sur Facebook: ''Les œufs non-éclos récoltés au nid étaient clairs: pas de développement embryonnaire''. L'examen est typiquement fait par mirage, c'est-à-dire en examinant les œufs par transparence sous une forte lumière, mais ce type d'examen n'est probablement pas capable de détecter un développement embryonnaire qui a été interrompu à un stade précoce.
     
 




 

mercredi 27 mars 2024

P04 revue au pont Jacques-Cartier, apparemment en couple!

Ce 16 mars j'ai pu confirmer la présence de P04 sur un pilier du pont Jacques-Cartier et sur un lampadaire du port de Montréal, en compagnie d'un mâle qui lui a offert une proie. P04 est une jeune femelle née en 2022 qui a été acheminée à l'UQROP après avoir été trouvée au sol dans le secteur de Varennes. Le 30 juin 2022 elle a été confiée en adoption au couple de faucon pèlerin qui nichait sous le pont Jacques-Cartier. Alors que normalement les jeunes faucons pèlerins quittent le territoire de leurs parents à l'automne, P04 était toujours présente sur le territoire de ses parents adoptifs au début de la nidification 2023; ses agissements ont d'ailleurs très probablement causé la mort des fauconneaux. La nouveauté de cette année est que tout indique que P04 est en couple et pourrait donc possiblement avoir ses premiers petits ce printemps!

P04 le 16 mars sur un lampadaire du port de Montréal

L'observation de P04 de ce 16 mars semble liée d'une part aux observations d'un couple de faucon pèlerin durant l'hiver au nichoir installé sur le pilier du pont Jacques-Cartier dans le port de Montréal, ainsi que sur l'ancienne tour de Radio-Canada. Et d'autre part aux observations plus récentes d'un couple à l'église Sainte-Brigide située en face de la nouvelle maison de Radio-Canada, incluant un accouplement (documenté par Sylvain Cusson). Il a pu être établi que la femelle qui fréquente la tour de Radio-Canada et l'église Sainte-Brigide est doublement baguée et 2 autres accouplements ont été observés en tentant de l'identifier.

Cet article est organisé comme suit. Une première section rappelle plus en détails l'histoire de P04. Dans une 2ième section je décris l'observation du 16 mars. La section suivante est consacrée aux observations de cet hiver au nichoir 3 du pont Jacques-Cartier, sur l'édifice Molson et sur l'ancienne tour de Radio-Canada. Les observations de comportements liés nidification de ce mois, en particulier à l'église Sainte-Brigide font l'objet de la dernière section. 


Remerciements
Merci beaucoup à Sylvain Cusson pour avoir attiré mon attention sur ce qui se passait aux églises Saint-Pierre-Apôtre et Sainte-Brigide de l'autre côté de Radio-Canada par rapport à mes points d'observations habituels, et pour avoir continué de partager ses observations. Merci également à lui pour ses photos et la permission de les partager ici, plus particulièrement sa photo d'un accouplement à l'église Sainte-Brigide impliquant une femelle baguée. Merci également à Environnement Faucon pour ses informations sur le statut du nichoir du pont Jacques-Cartier situé dans ce secteur et au docteur Guy Fitzgerald de l'UQROP pour ses précisions sur l'origine de P04. Cet article utilise également des informations provenant des publications Facebook d'Élise Deshaies ainsi que de Patrick Léger: merci à elle et à lui. Finalement merci aux personnes qui ont partagées leurs observations sur eBird et qui pour certaines m'ont donné des précisions supplémentaires, en particulier Marc-André Villard, François Thibault et Matthieu Beaumont.

 

Conventions

  • Numérotation des piliers du pont Jacques-Cartier: sauf erreur, le pilier du pont Jacques-Cartier qui se trouve dans le fleuve entre le port de Montréal et l'ile Sainte-Hélène est le numéro 24, celui dans le port de Montréal le numéro 25 et le pilier suivant vers l'ouest le numéro 26. Dans cet article je référerai à ces piliers par ces numéros.
  • Numérotation des nichoirs: dans cet article, les nichoirs pour faucon pèlerin installés sur des piliers du pont Jacques-Cartier sont numérotés de 1 à 3 à partir de la Rive Sud. Ils sont situés sur les piliers 9, 10 et 25.
  • Maisons de Radio-Canada: l'ancienne maison de Radio-Canada sera référée par ''tour de Radio-Canada'': pour des raisons de concision et parce qu'il s'écoulera probablement plusieurs années avant que l'édifice acquiert une nouvelle identité connue par tous, j'ai choisi d'omettre l'adjectif ''ancienne''. Rappelons que Radio-Canada a achevé à la fin de 2022 son déménagement dans un nouvel édifice, situé à l'angle du boulevard René-Levesque et de l'avenue Papineau (le Bye-bye 2022 a été la dernière émission tournée dans la tour d'après cette vidéo de Radio-Canada). La tour de Radio-Canada et le terrain avoisinant ont été achetés par le groupe Mach qui y développe le Quartier des lumières.

 

1. Une brève histoire de P04

2022

D'après le Docteur Guy Fitzgerald, P04 - alors juvénile - a été trouvée le 22 juin 2022 dans une zone industrielle de Varennes et acheminée à la Clinique des oiseaux de proie de la Faculté de médecine vétérinaire de l'Université de Montréal (cette clinique est un des piliers de l'effort de réhabilitation des oiseaux de proie par l'Union québécoise de réhabilitation des oiseaux de proie (UQROP)) où son examen n'a rien montré d'anormal. Une occasion de la relâcher s'est présentée lorsqu'une autre femelle (P03) a été reçue par la Clinique des oiseaux de proie/UQROP en provenance du nid du pont Jacques-Cartier (P03 avait été baguée au nid le 8 juin 2022 par des biologistes d'Environnement Faucon). P03 et P04 ont été relâchées ensemble près du nid du pont Jacques-Cartier le 30 juin 2022. Le couple a accepté sans problème le retour de P03 et a adopté P04. À ma connaissance la dernière observation de 2 juvéniles près du nid a été faite par Élise Deshaies le 27 juillet 2022; le même jour Sylvain Cusson n'a observé qu'une seule juvénile mais est parvenu à lire sa bague: c'est P04. Le 14 août 2022 j'observe une juvénile qui fait la sieste sur un des nichoirs mais j'échoue à l'identifier. Sur la disparition des juvéniles, voir cet article; sur la relâche de P03 et P04 et les observations subséquentes en 2022 voir cet article.
 
Le 23 août 2022 Patrick Léger a presque certainement photographié P04 près d'un autre nid de faucon pèlerin dans la carrière Francon sur l'ile de Montréal:
Bague partiellement lisible d'une juvénile à la carrière Francon (crédit: Patrick Léger)

2023

Le 13 mars 2023 Elise Deshaies découvre avec surprise la présence d'un faucon pèlerin immature interagissant avec le couple près du nid 2022 de faucon pèlerin au pont Jacques-Cartier. Le 18 mars 2023 elle montre que l'immature est baguée aux 2 pattes. Le 24 mars 2023 je parviens à lire sa bague de couleur: c'est P04! Pour plus de détails et des photos, voir cet article.
 
Le 22 mai 2023 un premier comportement de nourrissage est observé au nichoir du pont Jacques-Cartier déjà utilisé en 2022, suggérant qu'au moins un fauconneau du couple était né. Le lendemain P04 s'envole du nichoir avec un fauconneau nouveau-né, le condamnant à une mort certaine même si rien n'indique qu'elle l'a mangé... Rien n'indique qu'elle ait réservé ce sort à d'autres fauconneaux mais ses nombreuses présences au nid qui entrainaient quasi-systématiquement le départ de l'adulte et ses interceptions de la nourriture destinée aux fauconneaux expliquent presque certainement pourquoi aucun d'eux n'a survécu. Sur les agissements de P04 durant la nidification 2023, voir par exemple cet article.
 
Après la disparition des fauconneaux, le couple a recommencé à montrer des comportements d'incubation. P04 n'a montré aucun intérêt pour la couvaison; si cela avait été le cas il aurait fallu envisager la possibilité qu'elle ait pondu... L'explication la plus probable pour ce retour à un comportement d'incubation est qu'il restait un œuf non éclos de la ponte initiale et que le couple reportait tous ses espoirs sur cet œuf. L'arrêt de l'incubation s'est produit début juillet. La dernière présence près du nichoir de ce qui semble être P04 a été documentée le 3 juillet 2023 par Sylvain Cusson. Pour plus de détails voir cet article.  
 
Le 27 août 2023, j'identifie P04 par lecture de sa bague de couleur sur le même pilier du pont Jacques-Cartier où je l'ai retrouvée ce 16 mars 2024, voir plus loin.
 

2. Identification de P04 le 16 mars 2024

À 16h46 je remarque un faucon pèlerin sur le pilier 26 du pont Jacques-Cartier situé entre la rue Notre-Dame et le boulevard Viger à Montréal. J'ai tout de suite pensé à P04, d'abord parce que le seul faucon pèlerin que j'ai jamais observé à cet endroit était P04 (le 27 août 2023), ensuite à cause de l'observation par Sylvain Cusson le 4 mars d'un accouplement impliquant une femelle baguée sur une église à proximité (voir la section 4.3).

Mauvaise nouvelle pour moi, elle me présente son flanc gauche, or la bague lisible est sur sa patte droite. À 17h05 elle se secoue, ce qui me permet au moins de constater qu'elle est baguée à la patte gauche. À 17h14 elle dresse sa patte gauche, à 17h16 elle se gratte avec sa patte gauche. Et à 17h19mn08 elle s'envole... Je pensais alors que ce ne serait de nouveau pas cette fois que je parviendrai à lire la bague de sa patte droite (à supposer qu'elle en avait une)...

Mais quelques secondes après son envol, il y a eu de fortes vocalises et j'ai alors compris qu'elle avait rejoint un autre faucon dans la partie droite du pilier. À 17h19mn28 un faucon s'envole. Sa patte droite est clairement pendante alors qu'il traverse la rue Notre-Dame et les voies ferrées du port. Je réalise quelques instants plus tard qu'il est perché sur un lampadaire du port avec une proie et je comprends alors que c'est très certainement la femelle que j'observais tantôt, avec la proie apportée par le mâle.
P04 sur un lampadaire du port avec une proie, 17h20mn32
 
Un 2ième faucon pèlerin est d'ailleurs toujours présent sur la partie du pilier où a eu lieu le transfert de proie:
Faucon pèlerin mâle sur le pilier où a eu lieu le transfert de proie, 17h21mn14

Je concentre bien sur mes efforts sur le faucon pèlerin en train de manger sur le lampadaire, et je prends photo sur photo. Plusieurs d'entre elles montrent clairement l'inscription ''P04'' sur la bague de couleur, comme par exemple celle-ci (agrandissement)

Le mâle a traversé à son tour la rue Notre-Dame et s'est perché sur une corniche du pilier 25 du pont Jacques-Cartier, presque à la verticale du lampadaire où P04 mangeait, possiblement pour mieux veiller sur elle. J'espérais assister à un accouplement lorsque P04 aurait fini de manger mais cela ne s'est pas produit. P04 s'est envolé vers le fleuve à 17h50. Elle est réapparue quelques instants plus tard et a semblé se percher de l'autre côté du pilier. Or de l'autre côté de ce pilier il y a le nichoir pour faucon pèlerin où l'on voyait occasionnellement un et parfois 2 faucons pèlerins cet hiver depuis l'ile Sainte-Hélène (voir la section suivante).
 
P04 avant son envol

Le mâle était toujours sur son pilier à 17h55. À 17h56 j'ai vu du coin de l’œil du mouvement au-dessus des rails et quelques instants plus tard j'ai trouvé le mâle sur un autre lampadaire avec une proie qu'il venait apparemment juste d'attraper. Il a mangé puis s'est envolé à 18h03.
 
 

3. Observations de P04 et d'un couple dans ce secteur depuis la fin de l'été 2023

3.1 P04 sur le pilier 26 du pont Jacques-Cartier entre Viger et Notre-Dame le 27 août 2023

Le 26 août 2023 Marc-André Villard observe un faucon pèlerin perché sur un lampadaire du pont Jacques-Cartier du côté de Montréal depuis l'avenue De Lorimier (rapport eBird). Je décide donc d'aller jeter un coup d’œil à ce secteur (ou plutôt d'y retourner, parce que j'y avais fait un rapide passage le 25 août dans l'espoir de documenter ce que je soupçonnais depuis un certain temps, à savoir la présence du couple de faucon pèlerin du pont Jacques-Cartier du côté de Montréal en-dehors de la période de nidification). Après avoir jeté un coup d’œil au pont Jacques-Cartier puis examiné l'édifice de la Sureté du Québec, j'ai traversé la rue Notre-Dame pour me retrouver en bordure des voies de chemin de fer du port. Peu après 11h je repère un faucon pèlerin sur le pilier 26, du côté de la rue Notre-Dame. 
 
Comme à chaque fois que je trouve un faucon pèlerin, je tente de photographier ses pattes dans l'espoir qu'il est bagué. Une heure plus tard j'ai la preuve qu'il s'agit de P04:

Pour d'autres photos, voir cette publication Facebook. Je suis repassé en fin de journée entre 18h30 et 19h mais elle n'était plus là. Les jours et les semaines qui ont suivi, j'ai tenté sans succès de la revoir, soit depuis la rue Notre-Dame, soit depuis l'ile Sainte-Hélène. Ces tentatives ont conduit aux observations décrites dans les sous-sections suivantes.
 

3.2 Faucon(s) pèlerin(s) sur la tour de Radio-Canada, l'édifice Molson et le pont Jacques-Cartier

  • 4 octobre 2023, 2 individus au sommet de la tour de Radio-Canada, puis plus tard un individu au sommet de l'édifice de la SQ:  à 7h50 je repère un premier individu au sommet de la tour de Radio-Canada qui est rejoint 3 minutes plus tard par un 2ième. Lorsque le dernier individu quitte l'édifice, je décide de marcher dans sa direction de départ et je finis par repérer un individu sur une antenne de l'édifice de la SQ. Pour plus de détails et des photos, voir cette publication Facebook.
  • 26 octobre 2023: individu sur un édifice au coin des rues Parthenais et Notre-Dame observé de 17h08 à 17h34 (envol)
  • 27 octobre 2023: faucon en vol et vocalises de faucon pèlerin près de la tour de Radio-Canada
  • 28 octobre 2023: un faucon tente de surprendre des pigeons sur le pilier 26 du pont Jacques-Cartier puis s'éloigne vers Radio-Canada
  • 12 novembre 2023: 2 faucons pèlerins chassent ensemble depuis la tour de Radio-Canada, voir cette publication Facebook et cette vidéo Youtube.
  • 20 décembre 2023: faucon pèlerin perché au sommet de la tour de Radio-Canada qui s'est envolé vers le pont Jacques-Cartier.
  • 22, 23 décembre 2023: faucon pèlerin sur un édifice de Molson
  • 24 décembre 2023: faucon pèlerin successivement sur un édifice Molson, sur la pierre du pilier 25, sur une fixation de canalisation du pilier 25 et sur un lampadaire du port. À 14h42 un faucon pèlerin que j'avais repéré à 14h08 sur un édifice de Molson s'envole vers le pont Jacques-Cartier. Je le retrouve perché sur le pilier 25 à 15h02. Il s'envole aussitôt et disparait du côté nichoir du pilier. De 15h11 à 15h13 il est perché sur une fixation de canalisation verticale du pilier 25:

    Vraisemblablement suite à une tentative ratée d'attraper un oiseau, il se perche à 15h14 sur un lampadaire du port où il se trouvait encore quand j'ai quitté à 15h24.
  • 9 janvier 2024: faucon pèlerin non bagué en train de manger sur l'édifice de Molson qui est par la suite allé se percher à une fenêtre de la tour de Radio-Canada, voir cette publication Facebook pour plus de détails et quelques photos.
  • 17 janvier 2024: 2 individus en vol à 15h15 dont 1 qui s'est perché à une fenêtre de la tour de Radio-Canada.
  • 8 février 2024: à 16h20 je repère un individu à une fenêtre de la tour de Radio-Canada, du côté de la tour de Radio-Canada. Il s'envole à 16h38 après avoir manifestement repéré un autre individu qui se dirigeait vers l'église Sainte-Brigide. Les 2 individus arrivent approximativement à l'église en même temps et on entend des vocalises. Un des faucons s'envole presque immédiatement et se perche sur la pointe d'un clocheton, l'autre quitte peu après et va se percher sur le clocher de l'église Saint-Pierre-Apôtre. C'est la première fois que j'observe des faucons pèlerins à ces 2 églises mais Sylvain Cusson a eu plusieurs occasions de les y voir (voir la section 4).  Les 2 ont quitté ensemble à 16h43. J'ai par la suite retrouvé un individu à une fenêtre de la tour de Radio-Canada, sur une façade visible depuis la rue Wolfe. Pour des photos, voir cette publication Facebook.
  • 20 février 2024: je commence par observer un faucon pèlerin en vol au-dessus du pont Jacques-Cartier au niveau du pilier 25, qui se perche sur un câble près d'une mini tour-Eiffel. Il s'envole à 16h vers la nouvelle Maison de Radio-Canada. En me rendant dans ce secteur je découvre 2 faucons pèlerins perchés au sommet de la tour de Radio-Canada. Les 2 s'envolent à 16h20. À 16h26 j'en retrouve un au sommet de la tour de Radio-Canada mais du côté de la rue Alexandre DeSève. À 16h36 il plonge vers la rue Viger en direction du pont Jacques-Cartier. Plusieurs photos de faucon pèlerin en vol dans cette publication Facebook.
     

3.3 Faucon(s) pèlerin(s) au nichoir du pilier 25

Le pilier 25 est un des 3 piliers du pont Jacques-Cartier à abriter un nichoir pour faucon pèlerin. Ce pilier a fait l'objet pendant plusieurs années de travaux de réfection qui se sont terminés au printemps 2023. Pendant les travaux, le nichoir a été barricadé - voire possiblement enlevé pendant une certaine période - pour la sécurité des travailleurs (les faucons pèlerins défendent en effet énergiquement leur nid) et le bien-être des faucons pèlerins (nicher trop près d'un chantier serait une source importante de stress pour la famille). Depuis le retrait des échafaudages au printemps 2023, je vérifie régulièrement le statut du nichoir (ouvert ou fermé).
 
Le 23 novembre 2023 à l'occasion d'une sortie ornithologique avec la SBM, je remarque pour la première fois un faucon pèlerin à ce nichoir (voir aussi ce rapport eBird)

Environnement Faucon qui gère la cohabitation faucon pèlerin/travailleurs pour le compte de la société Les Ponts Jacques-Cartier et Champlain Incorporée (PJCCI) et à qui j'ai communiqué l'observation, m'a indiqué que ''Le nichoir du côté Montréal devra rester fermé encore quelques temps. En effet, les travaux de ce côté-là du pont ne sont pas terminés et nous souhaitons encourager la nidification du côté rive-sud pour éviter tout conflit de cohabitation entre le couple et les travaux d’entretien du pont''.

Un faucon pèlerin (et parfois 2)  a également été observé à ce nichoir aux dates suivantes (les liens mènent aux rapports eBird de la SBM):  18 janvier 2024, 15 février 2024, 29 février 2024 (les sorties de la SBM au parc Jean-Drapeau étaient aux 2 semaines pendant l'hiver).

2 faucons pèlerins au nichoir du côté Montréal, 18 janvier 2024

Compte tenu de la difficulté à observer ce nichoir en hiver (ce nichoir est essentiellement observable aux jumelles ou avec un appareil photo à fort zoom depuis l'ile Sainte-Hélène ou depuis la piste multifonctionnelle du pont Jacques-Cartier) il est permis de penser que les présences des faucons pèlerins à ce nichoir étaient plus nombreuses que suggéré par les observations.  Se pourrait-il que malgré la planche qui barre l'entrée du nichoir, les faucons pèlerins reconnaissent le même type d'objet que celui dans lequel ils ont niché de l'autre côté du pont et espèrent que la planche soit retirée ? J'ignore exactement quand ce nichoir a été fermé en prévision des travaux mais il était ouvert le 28 avril 2019 lorsque j'ai observé pour la première fois un couple de faucon pèlerin au pont Jacques-Cartier, voir cet article : il est donc tout à fait possible qu'un faucon pèlerin du couple actuel a connu ce nichoir alors qu'il était ouvert.

On peut également remarquer qu'en 2019 le couple a été observé sur le pilier 24, c'est-à-dire le pilier voisin du pilier voisin de celui du nichoir, et qu'en 2021 (la COVID-19 a fortement réduit mes observations dans ce secteur en 2020) le couple a d'abord considéré nicher sous une plateforme de chantier du pilier 24 avant de s'installer sous la bretelle d'accès du pont à l'ile Sainte-Hélène, voir cet article de mon blogue (en 2021 les travaux étaient en cours sur le pilier 25).


4. Activités à l'église Sainte-Brigide: interaction avec un 3ième faucon, accouplement, exploration d'un endroit susceptible d'abriter un nid

L'église Sainte-Brigide-de-Kildare (en abrégé: Sainte-Brigide) est située au coin de la rue Alexandre DeSève et du boulevard René-Levesque, en face de la nouvelle maison de Radio-Canada (fiche du site imtl.org). Cette église semble présentement abandonnée mais fait l'objet d'un projet de reconversion, voir par exemple cet article du Journal de Montréal

L'observation la plus intéressante de faucon pèlerin à cette église est sans conteste celle par Sylvain Cusson d'un accouplement impliquant une femelle baguée le 4 mars 2024. Mais avant d'arriver à cet évènement, il y a eu quelques autres observations intéressantes, par lui et par d'autres personnes.

4.1. 8 février 2023: un faucon pèlerin perché sur la nouvelle maison de Radio-Canada et un autre en vol

Le 8 février 2023 François Thibault observe 2 faucons pèlerins en vol au-dessus de la nouvelle maison de Radio-Canada dont un qui s'est perché sur la rambarde vitrée du toit et y resté pendant quelques minutes (rapport eBird). Rappelons que la nouvelle maison de Radio-Canada est située juste en face de l'église Sainte-Brigide.
 
Bien que moins directement liée à l'église Sainte-Brigide, je mentionne également mon observation du 18 mars 2023 d'un faucon pèlerin immature sur le toit de l'édifice de la Place Dupuis près de la station de métro Berri-UQAM (rapport eBird avec photo). Malheureusement ce faucon s'était envolé avant que je finisse de déployer mon trépied puisque j'aurais bien aimé tenté de voir s'il s'agissait de P04. Le 6 février 2023, un biologiste, Matthieu Beaumont, a observé un faucon pèlerin perché sur ce même édifice, voir ce rapport eBird et ma publication Facebook avec des précisions additionnelles fournies par Matthieu Beaumont.

4.2. 19 décembre 2023: interaction impliquant 3 faucons pèlerins

Le 19 décembre 2023 Sylvain Cusson remarque un faucon pèlerin tourner au-dessus de l'église Sainte-Brigide et entend des cris provenant apparemment de l'intérieur de l'église. Un 3ième faucon pèlerin arrive et une poursuite débute. Voici ce qu'il m'a écrit (j'ai légèrement édité son texte):

Le 19 décembre sur l'église en face de radio-canada un faucon tournait autour de l'église et un faucon lançait des cris à l'intérieur et puis un autre faucon est arrivé et une chasse a commencé. Ils ont disparu de ma vue 5 minutes plus tard ils sont revenus l' attaque a continué mais doucement ce qui me fait penser que peut être un juvénile était de la partie après ils sont disparus vers l'ouest.  Il était 2h30 pm.
 
Dans un courriel subséquent il a précisé que l'église en question était celle de Sainte-Brigide. Il m'a aussi mentionné voir occasionnellement un faucon pèlerin perché sur les églises Saint-Pierre-Apôtre et Sainte-Brigide depuis l'automne.
 
Faucon pèlerin sur l'église Sainte-Brigide, 31/10/2023 (crédit Sylvain Cusson)

Faucon pèlerin sur l'église Sainte-Brigide, 31/10/2023 (crédit Sylvain Cusson)

 

4.3.  4 mars 2024: accouplement de faucon pèlerin, femelle baguée!

Vers 15h30 le 4 mars 2024 Sylvain Cusson voit arriver un faucon pèlerin sur l'église Saint-Brigide. Au bout de quelques instants il se met à vocaliser. Un 2ième faucon arrive et il y a accouplement. Les 2 photos ci-dessous montrent la femelle juste avant l'accouplement puis l'accouplement proprement dit. 
 
Femelle juste avant l'accouplement (crédit Sylvain Cusson)

Accouplement, bague visible à la patte gauche de la femelle (crédit Sylvain Cusson)

Sur la 2ième photo on voit clairement que la femelle est baguée à la patte gauche. C'est la bague en aluminium du Service canadien de la faune, qui comporte 8 ou 9 (petits) chiffres et qui de ce fait est quasiment impossible à lire à distance. La question qui se pose immédiatement est si la femelle est également baguée à la patte droite: si oui cette 2ième bague est une bague dite de couleur, avec un petit nombre de caractères écrits en grand de façon à pouvoir être lus à distance. La lecture de cette hypothétique bague permettrait de connaitre l'identité du faucon grâce à l'information obtenue en retour lorsqu'on signale un oiseau bagué via ce site d'Environnement et Changement Climatique Canada. La femelle pourrait également être baguée uniquement à la patte gauche, auquel cas il pourrait s'agir d'un individu soigné par l'UQROP puis relâché (d'autres provenances seraient également possibles).


4.4 Tentatives de ré-observation

Suite à l'annonce par Sylvain Cusson de son observation, j'ai passé du temps dans ce secteur pour tenter de déterminer si le faucon était également bagué à la patte droite, et si oui, tenter de lire la bague, et ce jusqu'au samedi 9 mars, moment où j'ai publié sur Facebook les informations obtenues jusqu'à là. Ces tentatives d'identifier la femelle m'ont également permis d'observer les comportements du couple, je présente une partie de ces observations dans cette partie.
 
Le 5 mars, après avoir trouvé aucun faucon pèlerin aux églises Sainte-Brigide et Saint-Pierre-Apôtre ainsi que sur la tour de Radio-Canada, je repère à 16h23 un faucon pèlerin sur le pilier 24 situé dans le fleuve entre Montréal et l'ile Sainte-Hélène. Quelques instants plus tard j'observe un faucon pèlerin (probablement le même) en vol au-dessus du pont et qui se perche à un des points le plus haut du pont, au pied d'une ''tour Eiffel'' au-dessus du pilier 25.
Faucon pèlerin au pied d'une ''tour Eiffel'' du pont Jacques-Cartier, 5 mars 2024

Il s'envole à 16h59 vers la nouvelle Maison de Radio-Canada et je le perds de vue mais à 17h01 un faucon pèlerin s'envole de l'église Sainte-Brigide, se dirige vers la tour de Radio-Canada et des vocalises se font entendre. Je repère alors un faucon (bagué comme je le découvrirai plus tard: il s'agit donc presque certainement de la femelle) à une des fenêtres de la tour, et celui en vol ne cesse de passer rapidement devant elle. J'ai d'abord pensé que ce 2ième faucon cherchait à déloger la femelle mais je penche plutôt pour des vols de séduction de la part d'un mâle. Après quelques minutes il a cessé mais a recommencé ses passages un peu plus tard. La femelle s'est envolée à 17h59 (donc 12mn après le coucher du soleil) et peu après il y a eu des arrivées et des départs à l'église Sainte-Brigide (il y avait 2 faucons en vol mais je ne peux pas dire si les 2 sont allés à l'église)
 
Le 7 mars entre 15h20 et 17h40 j'observe à nouveau 2 faucons pèlerins, incluant plusieurs accès à la tour de Radio-Canada et à l'église Sainte-Brigide mais je ne fais aucun progrès en ce qui concerne les bagues de la femelle. J'étais également passé le matin vers 7h15 mais je n'avais vu aucun faucon.

Le 8 mars je décide d'y aller en matinée et de surveiller de près l'église Sainte-Brigide. J'y observe 2 rencontres du couple: une à 10h26, l'autre à 12h06. Dans la vidéo ci-dessous j'ai commencé par présenter l'enregistrement de 12h06 puisque c'est celui où l'on voit le mieux un faucon pèlerin (le 2ième individu a profité que je zoomais sur le premier pour s'envoler de la façade adjacente) mais la visite de 10h26 est également intéressante parce qu'elle suggère que les 2 faucons étaient présents dans l'église pendant plusieurs minutes en silence et sans être visibles.
 
Un faucon pèlerin (le mâle) était de nouveau visible sur l'église à 12h50 juste avant s'envoler. Je le suis des yeux, il change plusieurs fois de direction puis se dirige vers la tour de Radio-Canada. Et là surprise, j'observe le surplace avec battement d'ailes caractéristique d'un accouplement au sommet de la tour! Pourtant j'avais examiné à quelques reprises la tour, à l’œil nu, et je n'avais rien vu. Mais même en sachant où regarder (après l'accouplement) j'ai eu du mal à localiser la femelle avec mon appareil photo. Une fois la femelle localisée je l'ai filmée en espérant voir un autre accouplement, qui s'est effectivement produit, à 13h13:
La photo ci-dessous suggère que la femelle est baguée à la patte droite:

La femelle s'est envolée à 13h37 en direction de l'église Sainte-Brigide mais malheureusement je ne voyais pas l'église depuis l'endroit où je me trouvais. Une surveillance vidéo de l'église Sainte-Brigide entre 13h43 et 14h37 n'a donné aucun résultat. À 15h55 j'ai de nouveau vu un faucon pèlerin se diriger vers l'église Sainte-Brigide, ce qui m'a amené à déclencher immédiatement une surveillance vidéo mais celle-ci ne montre aucune arrivée sur l'église. De 16h10 à 16h44 un faucon pèlerin était visible sur la tour de Radio-Canada.


Ma dernière tentative avant de partager l'information sur la présence d'une femelle baguée dans ce secteur a eu lieu le matin du 9 mars. Le vent était fort et faisait voler des détritus en plein vers la partie de l'église que les faucons semblaient considérer pour une nidification. Cela explique peut-être que je n'ai vu aucune visite à cette partie de l'église.  À 8h39 j'observe 2 faucons pèlerins en vol près de la tour de Radio-Canada. Les 2 se rendent à l'église mais n'y restent pas longtemps. J'observe à nouveau des vols très rapides mais sans cri, sinon j'aurais pensé à la possible présence d'un intrus. À 8h43 un faucon est manifestement à l'église et vocalise et l'autre est en vol. Aux manœuvres de celui en vol alors qu'il est proche de l'église, je crois reconnaitre une tentative d'accouplement que le fort vent a sans doute fait échouer. Je trouve effectivement la femelle sur la façade de l'église donnant vers la rue Champlain (première fois que je voyais un faucon de ce côté-là de l'église). Je décide de la filmer, ce qui donnera ma meilleure évidence qu'elle porte aussi une bague à la patte droite lorsqu'elle s'envole à 9h. 



Après le 9 mars j'ai fortement ralenti mes efforts dans ce secteur au profit d'autres sites. Un court passage les 13 et 14 mars ne m'a pas permis de voir de faucon, ni sur la tour de Radio-Canada ni aux églises. Le 16 mars j'ai décidé de consacrer de nouveau un peu plus de temps à ce secteur. À 15h15 je repère les 2 faucons au sommet de la tour de Radio-Canada. À 15h39 ils s'envolent en direction de l'église Sainte-Brigide mais ne s'y arrêtent pas. Approximativement dans la direction où ils sont partis se trouve l'édifice de la SQ où j'avais déjà observé à plusieurs reprises un faucon pèlerin, ainsi que l'église Saint-Eusèbe et son sanctuaire Saint-Peregrin.... Je décide d'aller jeter un coup d’œil mais je n'y trouve rien. Je décide alors de descendre la rue Fullum jusqu'au port de Montréal. À 16h46 je repère un faucon pèlerin bagué sur le pilier 26 que je parviens à identifier comme étant P04, voir plus haut.

Sylvain Cusson a également effectué plusieurs passages à l'église Sainte-Brigide sans y revoir de faucon pèlerin. Il est trop tôt pour conclure que cette église ne sera finalement pas utilisée pour la nidification puisque plusieurs femelles faucon pèlerin de la région de Montréal pondent seulement au mois d'avril. Si le couple n'opte pas pour l'église Sainte-Brigide il sera intéressant de localiser leur nid. Les premiers endroits à considérer seront sans aucun doute les nichoirs du pont Jacques-Cartier du côté de Longueuil utilisés par les parents adoptifs de P04 en 2022 et 2023 et que P04 connait bien elle aussi. Le sommet de la tour de Radio-Canada serait un autre endroit possible s'il n'y a pas de présence humaine. L'autre question est si P04 est la femelle qui a été vue s'accouplant à 3 reprises au sommet de la tour de Radio-Canada et à l'église Sainte-Brigide et qui a visité un endroit susceptible d'abriter un nid en compagnie d'un mâle. La réponse à cette question est probablement oui puisque s'il y avait 2 femelles baguées dans le secteur dans la même période de temps (en plus possiblement de la mère adoptive de P04, qui n'est pas baguée), on aurait du voir des confrontations. Cela sera probablement confirmé lorsque le nid sera localisé mais il semble bien qu'on se dirige vers la première nidification de P04, et en plus dans le territoire de sa mère adoptive ou très proche de celui-ci, ce qui soulève la question du sort de cette dernière.