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vendredi 26 novembre 2021

Observations inusitées d'un harfang des neiges dans les arrondissements de Verdun et Pointe-Saint-Charles ainsi qu'à l'Université de Montréal

Un harfang des neiges a été découvert par Elise Deshaies et observé par plusieurs personnes samedi 20 novembre 2021 à l'Université de Montréal. Il semble s'agir d'une première. Plus tôt ce mois-ci un harfang avait déjà causé une surprise sur un trottoir de Pointe-Sainte-Charles et de Verdun. D'après le docteur Guy Fitzgerald de l'Union québécoise de réhabilitation des oiseaux de proie (UQROP) une vague d'harfangs des neiges, composée principalement de juvéniles, déferle depuis quelques semaines dans le Sud.

Remerciements Un grand merci à toutes les personnes qui ont répondu rapidement à mes questions: Marilou Skelling, Guy Fitzgerald, Samuel Chartier-Bachand, Caroline Di Cesare, Zoe Fahrni et Christine Peters. Merci également à Elise Deshaies, Zoe Fahrni et Christine Peters pour la permission d'utiliser leurs photos et vidéos.


5 novembre 2021 vers 9h10: un harfang au sol dans l'arrondissement de Verdun

Christine Peters marchait sur la rue Caisse en direction de la station de métro Lasalle lorsque elle a aperçu le harfang poursuivi par une dizaine de corneilles. Ils semblaient venir de Pointe-Saint-Charles sur le boulevard Lasalle. Il s’est posé dans le gazon sur le coin du maison à l’intersection du Boulevard Lasalle et de la rue Caisse avec les corneilles qui semblaient vouloir l’attaquer. Ils sont restés un moment puis se sont envolé sur la rue Caisse en direction de la rue Wellington. Le harfang s'est éloigné avec des feuilles entre les pattes.
 
Harfang et corneille sur un trottoir de Verdun (Crédit: Christine Peters)

 
Harfang des neiges harcelé par des corneilles, Verdun, 5/11/2021 (crédit: Christine Peters)
 
L'heure de la photo est 9h10.


5 novembre 2021 vers 9h16: un harfang sur un trottoir de Pointe-Saint-Charles

Harfang sur un trottoir (crédit: Zoe Fahrni)

En marchant vers sa voiture le matin du 5 novembre, Zoe Fahrni a remarqué qu'il y avait beaucoup de corneilles mais n'y a pas prêté trop attention. C'est en sortant du stationnement au volant de sa voiture qu'elle a aperçu le harfang sur le trottoir de la rue de Rushbrooke. Elle est ressortie de la voiture et a pris cette photo. Il était alors 9h16. Le harfang s'est envolé peu après, poursuivi par les corneilles.

Le 7 novembre, Caroline Di Cesare a publié une mise à jour qui rappelait ces 2 observations, mentionnait que les agents de la faune avaient été avisés et invitait à lui signaler d'éventuelles nouvelles situations où le harfang semblerait en difficulté. C'est je crois par cette publication que j'ai appris l'existence de ces 2 observations.

Un harfang qui s'est brièvement posé au sol alors qu'il était poursuivi par un corbeau a par la suite été signalé sur eBird au Jardin Botanique le 8 novembre.


20 novembre 2021: un harfang à l'Université de Montréal

Alors qu'elle observait le couple de faucon pèlerin à l'Université de Montréal, Elise Deshaies a eu la surprise de découvrir un visiteur inattendu: un harfang des neiges!  
 
Harfang des neiges à l'Université de Montréal (crédit: Elise Deshaies)

Les faucons et le harfang se tenaient sur des parties différentes du pavillon Roger Gaudry et ne pouvaient pas se voir. Seul Sphinx (le mâle) était encore présent lorsque le harfang a été découvert mais on peut penser que ce dernier était déjà là quand Eve, la femelle faucon pèlerin, était présente. La photo suivante montre les localisations du faucon pèlerin mâle et du harfang (le faucon est presque impossible à voir sur la photo mais la caméra 3 de Faucons de l'UdeM atteste sa présence à cet endroit de 13h05 à 14h47; les cercles jaunes ont été ajoutés par moi sur la photo d'Elise Deshaies, cependant Huguette Lenoir avait été la première à publier une telle photo indiquant la localisation des 2 oiseaux). 
 
Position du faucon et du harfang (photo d'Élise Deshaies annotée par moi)
 
Fait intéressant: le harfang se tenait à l'endroit où un faucon pèlerin avait mangé le 19 mars dernier et caché le restant du repas, voir cette vidéo. On ignore si les faucons ont utilisé cet endroit récemment pour manger/stocker une proie mais on ne peut pas tout à fait exclure que le harfang ait volé de la  nourriture aux faucons!
 
D'autres photos prises par Élise Deshaies ainsi que son récit se trouvent dans cette publication Facebook (2ième lien), voir également son rapport eBird

Huguette Lenoir a partagé l'information de la découverte du harfang à 13h33 sur le chat de la caméra de Faucons de l'UdeM.  Elise Deshaies avait trouvé le harfang en cherchant Eve qui s'était envolée à 12h54, toujours selon Huguette Lenoir. Lorsque j'ai pris connaissance de ces informations à 14h06, je me trouvais à l'église Saint-Jean-Baptiste où je venais de constater qu'un faucon pèlerin occupait déjà le perchoir d'Eve. Mon premier objectif - déterminer le moment où le faucon arriverait à l'église - était donc raté! Mon 2ième objectif était de tenter de voir si le mâle qui l'accompagnait était bagué ou non mais celui-ci arrivait généralement bien plus tard et il s'agissait vraisemblablement de Sphinx qui était encore à l'Université de Montréal. Compte tenu du caractère exceptionnel de la visite du harfang j'ai décidé de me rendre à l'Université de Montréal. Je suis arrivé sur place à 15h et je l'ai surveillé jusqu'à 16h30. Il n'a pas quitté son perchoir, alternant des périodes de somnolence et d'observation de son environnement. Voici une vidéo montrant quelques uns des moments où il était le plus expressif:


J'y suis retourné le lendemain dès les premières lueurs du jour: à 6h30 il n'était plus son perchoir.

 

Des observations isolées ou le symptôme d'un phénomène plus large ?

Je connais très peu le harfang des neiges mais les trottoirs de Pointe-Saint-Charles et de Verdun et l'Université de Montréal ne font pas partie des endroits où j'irais si je souhaitais en observer à Montréal! Je les chercherais plutôt aux abords de l'aéroport ou sur les lampadaires des autoroutes dans l'ouest de l'ile. 
 
Comment interpréter ces 2 observations en apparence insolites ? Une première possibilité est qu'elles sont dues au hasard et qu'il ne faut pas leur donner de signification particulière. Il y a peut-être chaque année un harfang qui se retrouve sur un trottoir de Montréal mais soit qu'il n'y a personne pour le photographier, soit que la nouvelle n'arrive pas à ma connaissance (notons que de plus en plus de sites ne partagent plus les observations de chouettes et de hiboux en raison des dérangements excessifs que ces signalement occasionnent). De même il y a peut-être chaque année un harfang qui fait escale à l'Université de Montréal mais qu'il n'y a personne de présent au bon moment pour l'observer. À l'inverse une autre possibilité est que ces observations insolites sont le symptôme d'une présence importante de harfangs en ville: plus il y a de harfangs plus il y a de chance que l'un ou l'autre agisse bizarrement et se fasse remarquer.

Pour tenter d'y voir plus clair j'ai communiqué avec différentes personnes dont le travail est lié au moins partiellement aux harfangs. Voici ce que j'ai appris:
 

Marilou Skelling, directrice des opérations à Environnement Faucon et responsable du programme de capture et de relocalisation des harfangs à l'aéroport de Montréal

Lors de leurs incursions dans le Sud, les harfangs apprécient beaucoup les aéroports en raison du vaste terrain plat où circulent les petits rongeurs dont ils s'alimentent. Malheureusement, en raison de leur taille, une collision d'un harfang avec un avion au décollage ou à l’atterrissage pourrait avoir de sérieuses conséquences. C'est la raison pour laquelle les harfangs sont piégés puis relâchés à bonne distance. À Montréal cette tâche est confiée à l'entreprise Environnement Faucon. Cette vidéo d'ADM - Aéroports de Montréal montre la capture d'un harfang, son examen puis sa relâche à une centaine de kms de là, voir également cette fiche d'information produite par Environnement Faucon. Certains des harfangs capturés sont équipés d'une balise GPS pour suivre leurs déplacements dans le cadre du projet SnowStorm. Le projet SnowStorm est un projet de recherche collaborative nord-américain sur les harfangs des neiges financé entièrement par des dons du public.
 
Marilou Skelling m'a indiqué que les premières captures sont généralement réalisées vers le 10 novembre: la saison est donc bien jeune. Elle n'avait pas de chiffres sur le nombre de captures à partager, se contentant d'indiquer que la saison était bien lancée. Le seul fait notable jusqu'à présent est que la première capture a été réalisée plus tôt que d'habitude, dès la fin octobre. Ce harfang, qui semblait en mauvaise condition physique, est malheureusement décédé peu de temps après à la Clinique des oiseaux de proie.


Guy Fitzgerald, fondateur de la Clinique des oiseaux de proie et médecin-vétérinaire, président de l'UQROP

J'ai contacté le Docteur Guy Fitzgerald initialement pour avoir plus d'informations sur le harfang décédé mais j'en ai profité pour lui demander s'il avait observé quelque chose d'inhabituel dans les admissions d'harfang à la clinique. Lui non plus n'a pas fourni de chiffres mais sa réponse est très intéressante. ''Il y a depuis quelques semaines une vague de harfangs des neiges (pas seulement à Montréal), principalement des juvéniles, observée un peu partout. Il y a même eu 3 harfangs observés en Espagne, chose tout à fait inusitée.''. Plus loin il qualifie cette vague d'importante et indique que pour l'instant on ne sait pas trop pourquoi mais que généralement l'arrivée d'un grand nombre de juvéniles dans le Sud est le résultat d'une saison de reproduction particulièrement bonne. Il rappelle que le harfang est une espèce reconnue pour son comportement nomade et que les mouvements actuels sont des mouvements ''aléatoires,  exploratoire et en lien avec la disponibilité de nourriture'' contrairement à une migration qui a un caractère plus structuré. Il n'avait pas de diagnostic définitif à partager concernant le harfang décédé.
 
Plus tôt aujourd'hui 26 novembre, le docteur Fitzgerald est intervenu en direct depuis la grande volière de Chouette à Voir pour présenter les harfangs en attente d'être relâchés et inviter le public à assister à la remise en liberté en direct de 2 d'entre eux mardi 30 novembre dans le cadre de l'évènement ''Mardi Je donne''. Rappelons que l'UQROP (Union québécoise de réhabilitation des oiseaux de proie)  ne reçoit pour son fonctionnement aucun financement récurrent de la part des gouvernements et dépend donc en grand partie des contributions du public. Différentes façons de contribuer (membership, dons, bénévolat, ...) sont indiquées sur cette page.
 
Quelques mots sur les harfangs observés en Espagne mentionnés par le docteur Fitzgerald. Les informations qui suivent sont tirées de cet article d'ornithomédia. 3 harfangs juvéniles ont été observés dans le Nord-ouest de l'Espagne les 8, 10 et 13 novembre. Le premier était épuisé et est mort peu de temps après dans un centre de soin. Les 2 autres sont de sexe différent, ce qui permet d'affirmer que ce sont bien 2 individus différents. Le harfang est présent dans les pays nordiques d'Europe, par exemple en Suède, mais l'Espagne est très loin de sa zone d'hivernage habituelle. L'hypothèse d'oiseaux échappés de captivité  a été considérée mais rien pour le moment n'appuie cette thèse. Une autre possibilité est que ces harfangs soient d'origine nord-américaine et qu'ils aient traversé l'océan... Possiblement en effectuant une partie du voyage à bord d'un navire: l'article d'Ornithomédia rappelle qu'en 2001 deux harfangs s'étaient posés en pleine mer sur des chalutiers en provenance de Terre-Neuve et d'Irlande et avaient été soignés en Espagne avant d'être relâchés en Finlande. Des analyses isotopiques en cours sur des plumes de l'oiseau décédé pourraient apporter plus d'information sur leurs origines.

Samuel Chartier-Bachand, agent de protection de la faune, Bureau de protection de la faune de Saint-Jean-sur-Richelieu

Le bureau de Saint-Jean-sur-Richelieu est responsable de la région de Montréal. J'ai contacté Monsieur Chartier-Bachand principalement pour savoir s'il y avait eu finalement une intervention dans le cas du harfang de Pointe-Saint-Charles et j'en ai profité pour demander s'il pouvait me donner des informations plus générales sur la situation récente de cet oiseau à Montréal. Il m'a répondu qu'il y a eu 2 signalements en novembre pour des harfangs potentiellement en difficulté (la dernière en date du 24 novembre) mais que dans les 2 cas l'oiseau était en santé et qu'aucune intervention n'a été effectuée.
 

mardi 23 novembre 2021

Présences répétées d'un faucon pèlerin au Collège Brébeuf

Tout porte à croire qu'un faucon pèlerin a utilisé ces dernières semaines le Collège Brébeuf comme dortoir! Ce faucon pèlerin serait Eve, la femelle qui a niché à l'Oratoire Saint-Joseph. Ce faucon semble maintenant bien installé à son dortoir hivernal à une église du Plateau alors que le dortoir de Brébeuf était inoccupé lors de mes 3 dernières visites.

Important 

Pour la tranquillité des faucons pèlerins (et autres oiseaux) qui se perchent pour passer la nuit, ne dirigez pas le faisceau d'une lampe-torche ou le flash d'un appareil photo sur leur cachette. Et si le dortoir est situé près d'une fenêtre, ne tentez pas une observation depuis cette fenêtre si vous n'utilisez pas cette fenêtre habituellement. Aussi évitez de trop publiciser l'endroit pour éviter le dérangement par des personnes moins respectueuses que vous. En ce qui me concerne, je me donne comme règle de ne pas dévoiler un dortoir pendant qu'il est utilisé.
 
Faucon pèlerin au Collège Brébeuf le 8 novembre

 

Premier indice: des vols de l'Oratoire Saint-Joseph vers l'Hôpital Sainte-Justine

Le Collège Brébeuf  est situé sur le chemin de la Côte-Sainte-Catherine à Montréal, près de l'Hôpital Sainte-Justine et pas loin de l'Université de Montréal et de l'Oratoire Saint-Joseph. Rappelons que le couple de faucon pèlerin (formé d'Eve et de Sphinx) qui nichait jusqu'à présent à l'Université de Montréal a niché cette année à l'Oratoire Saint-Joseph.

Un indice important de l'existence d'un dortoir dans le secteur de l'Hôpital Sainte-Justine a été le déplacement répété, en fin de journée, d'un faucon pèlerin de l'Oratoire Saint-Joseph - et plus tard de l'Université de Montréal - vers cet endroit. Un dortoir dans ce secteur était d'autant plus plausible que le 2 novembre 2018 un faucon pèlerin avait été surpris à une fenêtre de l'Hôpital Sainte-Justine, voir cet article. C'était la seule observation connue dans ce secteur mais l'hôpital regorge de perchoirs où il pourrait passer inaperçu.  

Le 17 septembre à 19h23 un faucon pèlerin s'envole de l'Oratoire Saint-Joseph en direction de l'Hôpital Sainte-Justine. Le 20 septembre à 19h09 je surveille les faucons pèlerins depuis l'intersection des rues Coronet et du Frère André quand l'un d'eux me survole et continue tout droit. À nouveau la direction est approximativement celle de l'Hôpital Sainte-Justine. Le 25 septembre je me poste à l'intersection des chemins de la Côte-des-Neiges et de Queen Mary pour m'assurer que le faucon traverse bien l'intersection. C'est ce qui se passe à 18h36. J'ai marché à sa suite jusqu'à l'Hôpital Sainte-Justine en examinant au passage la tour de la caserne 27 des pompiers mais je n'ai pas réussi à le retrouver.

 

21 septembre: fausse alerte

Le 21 septembre je décide de jouer gros et d'attendre le faucon pèlerin dans le secteur de l'Hôpital Sainte-Justine sur Côte-Sainte-Catherine... Je n'ai pas eu à attendre longtemps: à 18h56 un faucon s'est perché sur le toit du pavillon Lalemant du collège Brébeuf! Se pourrait-il que ce soit aussi simple ? Malheureusement non puisque ce n'est pas un faucon pèlerin mais plutôt un faucon émerillon:
Faucon émerillon sur le toit du pavillon Lalemant - 21 septembre 2021
 
Le faucon émerillon s'est envolé à 19h06 vers l'Hôpital Sainte-Justine. J'ai continué à guetter un éventuel passage de faucon pèlerin avant de quitter à 19h25.
 
J'ai refait une autre tentative - assez brève - le 18 octobre, sans succès. La difficulté est que l'espace à surveiller est grand et qu'on ne sait pas à quel moment le faucon passera. En fait on ne sait même pas s'il passera...


29 octobre: bingo! 

Le 29 octobre je surveillais  un faucon pèlerin sur la tour de l'Université de Montréal au coin des façades Avant et Chapelle. Quelques minutes plus tôt à 16h58 il avait fait une courte visite au nichoir, il s'agissait apparemment de Sphinx, le mâle. À 17h08 il a quitté la tour et s'est dirigé vers... l'Hôpital Sainte-Justine. Or c'était Eve que je soupçonnais dormir à l'Hôpital Sainte-Justine...

J'ai décidé de descendre à l'Hôpital Sainte-Justine. En descendant l'avenue Decelles je remarque un faucon pèlerin sur le toit du pavillon Jacqueline Desmarais de l'hôpital:

Il est 17h22. Commence alors l'attente de son départ pour voir où il irait ensuite, avec la crainte de rater ce moment par suite d'un moment d'inattention. Mais je ne suis pas capable de me concentrer exclusivement sur lui...  À 17h31 un petit détail attire mon attention sur un édifice du Collège Brébeuf de l'autre côté du Chemin de la Côte-Sainte-Catherine. 
Le Collège Brébeuf vu du chemin de la Côte-Sainte-Catherine

Comme je n'avais pas grand chose d'autre à faire, j'ai zoomé dessus:

L'autre faucon pèlerin!!
 
La photo suivante a été prise - au zoom également - à 17h32 au moment où le faucon pèlerin était éclairé par les rayons du soleil couchant.

L'endroit est tout à fait propice pour passer la nuit. Il est à l'abri des prédateurs terrestres, et la géométrie du lieu empêche une attaque à haute vitesse par un prédateur ailé.
 
À 17h35 le faucon pèlerin de l'Hôpital Sainte-Justine a vocalisé.  Puis il s'est envolé en direction du Collège Brébeuf. Quand il est passé proche de celui qui était perché, les 2 ont échangé quelques cris, puis il a continué sa route vers l'Université de Montréal.


Autres présences

J'ai pu constater la présence d'un faucon pèlerin à ce même endroit à 3 autres reprises.

 

Le 2 novembre à 17h15

Les 2 faucons avaient quitté la tour de l'Université de Montréal à 16h55.


 Le 4 novembre à 16h42

Comme il était tôt j'ai décidé d'aller examiner l'église qui était traditionnellement utilisée par Eve comme dortoir.  Logiquement il devrait n'y avoir aucun faucon. Et effectivement à 17h41 - soit 4 minutes après le coucher du soleil - aucun faucon n'était visible. Mais 10 minutes plus tard un faucon pèlerin était présent! De façon encore plus surprenante, il a quitté 2 minutes plus tard et ne semble pas être revenu à l'église. Qui était ce faucon? Une première possibilité est que c'était Eve - qui aurait donc quitté le Collège Brébeuf - mais dans ce cas elle aurait été très indécise puisqu'elle ne serait pas restée non plus à l'église. Si ce n'était pas Eve, ce pourrait être un autre faucon connu pour fréquenter cette église: Sphinx ou Eole. Ou un inconnu qui se magasinait un dortoir.
Faucon pèlerin inconnu à l'église habituellement utilisée par Eve


8 novembre

À 15h10 2 faucons quittent ensemble l'Oratoire Saint-Joseph. Un revient presque aussitôt alors que je suis l'autre aux jumelles jusqu'à ce qu'il disparaisse derrière le collège Brébeuf. À 16h je constate que le perchoir du Collège Brébeuf est inoccupé mais qu'il y a de nouveau un faucon pèlerin sur un toit de l'Hôpital Sainte-Justine. Par analogie avec ce qui s'était passé le 2 novembre, je me dis que c'est probablement Sphinx et que l'absence d'Eve pourrait indiquer qu'elle n'utilise plus le dortoir de Brébeuf.  A 16h22 je constate que le faucon n'est plus sur le toit. Je me déplace pour vérifier le perchoir du Collège Brébeuf: un faucon pèlerin y était! Il y était toujours à 17h09.

 

Perchoir inoccupé les 14, 16 et 20 novembre

Le 14 novembre à 16h49, le 16 novembre à 16h54 et le 20 novembre à 16h49, le perchoir du Collège Brébeuf était inoccupé. Par contre le 15 novembre à 16h47, 2 faucons pèlerins étaient présents aux dortoirs de l'église du Plateau. Le lendemain matin à 6h24 2 faucons pèlerins ont quitté cette église, une indication additionnelle qu'ils ont passé la nuit à cet endroit. Le 19 novembre un faucon pèlerin était présent à l'un des dortoirs de cette église à 15h, le 20 novembre un faucon était présent déjà à 14h05. Dans ces 2 derniers cas je ne suis pas resté jusqu'au coucher du soleil.  Finalement le 22 novembre 2 faucons pèlerins étaient présents aux dortoirs après le coucher du soleil. Ces observations suggèrent que Eve a recommencé à utiliser son dortoir hivernal (accompagnée de son mâle, ce qui est inhabituel mais qui avait déjà été observé l'an dernier). Le dortoir de Brébeuf - qui n'est pas abrité de la pluie et de la neige - ne devrait en principe plus être utilisé cette année (mais si vous y voyez un faucon pèlerin merci de me le signaler). 


dimanche 7 novembre 2021

Retour sur le déménagement des faucons pélerins de l'Université de Montréal à l'Oratoire Saint-Joseph

Cette saison, à la surprise de beaucoup de personnes - moi le premier - les faucons pèlerins ont délaissé le nichoir installé pour eux sur la tour de l'Université de Montréal pour nicher avec succès dans un ancien nid de corbeau à l'Oratoire Saint-Joseph. Le nichoir avait pourtant été utilisé sans interruption depuis 2009 (sauf en 2012 où il avait été retiré en raison de travaux sur la tour mais il avait été réoccupé dès sa réinstallation l'année suivante). Cet article revient sur les causes possibles de ce déménagement.

Cette question a été abordée dans cette publication Facebook du 13 juillet par Faucons de l'UdeM. Je suis tout à fait d'accord avec Eve Belisle lorsqu'elle écrit qu'il n'y a aucune explication évidente. Il y a possiblement plusieurs facteurs qui pris ensemble ont fait penché la balance en faveur de l'Oratoire Saint-Joseph.  Mais contrairement à elle je ne suis pas prêt à exclure aucun facteur. 

Remerciements: un grand merci à l'Oratoire Saint-Joseph pour avoir laissé les faucons pèlerins nicher chez eux malgré les travaux prévus. Si les nids de corbeau avaient été retirés en mars comme certains le souhaitaient, l'explication la plus logique de la présence des faucons pèlerins dans ces nids aurait été un séjour pré-nidification avant de nicher à l'Université de Montréal comme cela a été observé en 2019 et en 2020; une répétition de ce scénario était d'ailleurs plausible jusqu'au 6 avril. D'autre part cet article repose en grande partie sur les observations faites à l'Université de Montréal grâce aux installations de Faucons de l'UdeM: un grand merci à Eve Belisle, en premier lieu pour avoir fait installer le nichoir, qui aura été utilisé par les faucons avec beaucoup de succès de 2009 à 2020 (et dont on espère l'adoption de nouveau dans les années à venir). Merci également à elle pour le système de caméras qui permet de suivre les faucons de près ainsi qu'aux autres opérateurs/opératrices des caméras Sophie Lapierre et Paul Brunelle, et pour ses réponses à mes nombreuses questions. Merci également à Huguette Lenoir pour m'avoir donné accès à ses notes et à toutes les personnes qui ont partagé leurs observations.


Contexte

Une femelle qui aime changer de nid

Comme la femelle (Eve) n'est pas baguée il restera toujours un petit doute sur son identité. Ce qui suit suppose essentiellement que Eole n'a pas eu 2 femelles non baguées différentes (et semblables) comme partenaire entre 2014 et 2020.

Sous cette hypothèse, Eve aura niché à au moins 4 endroits différents, d'abord avec Eole jusqu'en avril 2020 puis avec Sphinx:
  1. Incinérateur des Carrières (tentative ratée en 2014; 2 fauconneaux en 2016)
  2. Église Saint-Marc (4 fauconneaux en 2015). Avant de déménager à l'église Saint-Marc les faucons donnaient toutes les indications qu'ils nicheraient de nouveau à l'incinérateur des Carrières. Après leur déménagement un faucon continuait d'être observé régulièrement à l'incinérateur (j'avais d'ailleurs trouvé le nid de l'église Saint-Marc en marchant dans la direction où était parti un faucon).
  3. Nichoir de l'Université de Montréal (4 fauconneaux en 2018, 4 fauconneaux en 2019; 2 fauconneaux en 2020). 3 nidifications de suite au même endroit, une première pour elle!
  4. Nid de corbeau de l'Oratoire Saint-Joseph (2 fauconneaux en 2021).
Le déménagement à l'église Saint-Marc est peut-être le plus susceptible de nous éclairer sur le déménagement à l'Oratoire Saint-Joseph; malheureusement on ignore également les raisons de ce déménagement mais dans cet article je pointais vers 2 causes possibles: le dérangement humain et le dérangement par d'autres faucons pèlerins (en particulier par un mâle adulte et par une femelle juvénile) à l'incinérateur des Carrières. Incidemment la corniche utilisée à l'église Saint-Marc présente plusieurs similarités (forme, hauteur, proximité d'arbre) avec celle utilisée à l'Oratoire Saint-Joseph, ce qui a pu faciliter le déménagement à l'Oratoire, d'autant que la nidification à l'église Saint-Marc a été l'une de ses plus productives (4 fauconneaux ont quitté le nid comme en 2018 et en 2019 mais l'hypothèse de 5 œufs a été évoquée pour expliquer l'écart d'age entre le plus jeune et ses ainés).

Le retour à l'incinérateur des Carrière en 2016 s'explique principalement par le fait que les gestionnaires de l'église Saint-Marc ont bloqué l'accès à la corniche que les faucons avaient utilisée en 2015.

Finalement la conquête de l'Université de Montréal avec l'éviction de la femelle résidente Spirit s'explique à mon avis surtout par le désir d'Eve de rejoindre Eole, son ancien partenaire à l'incinérateur des Carrières/église Saint-Marc (Eole fréquentait 2 femelles: Eve et Spirit; en 2017 il avait choisi Spirit à l'Université de Montréal).

 

L'Oratoire Saint-Joseph (et ses nids de corbeau), un endroit apprécié depuis longtemps par les faucons pèlerins

Les faucons pèlerins connaissent bien l'Oratoire Saint-Joseph et cela depuis que la présence des faucons pèlerins est documentée à l'Université de Montréal. Quant aux nids de corbeau de l'Oratoire Saint-Joseph, ils sont visités par les faucons pèlerins depuis au moins 2014.

Présence de faucon pèlerin dès 2006

La présence des faucons pèlerins à l'Oratoire Saint-Joseph pourrait en fait être antérieure à leur présence à l'Université de Montréal. Une personne qui travaillait à l'entretien paysager à l'Oratoire Saint-Joseph m'a en effet affirmé que les faucons étaient présents à l'Oratoire avant de déménager à l'Université de Montréal. D'après elle ils ont été remarqués alors qu'ils protestaient bruyamment contre les travailleurs qui restauraient le dôme. D'après ce document de l'Oratoire Saint-Joseph il y a eu des travaux au niveau du lanterneau en 2005 et au niveau des toits en 2006. Malheureusement aucun détail additionnel n'est fourni. Si vous avez plus de détails sur cet épisode, contactez-moi. Par ailleurs les archives de la liste ornitho-qc font état de l'observation d'un couple de faucon pèlerin à l'Oratoire Saint-Joseph en avril 2006 (message par Pierre Bannon du 19 avril 2006). Le couple est ensuite observé sur un édifice de Rockhill (messages par Pierre Bannon des 20 et 21 avril 2006). Dans cet article de son blogue ''Histoires de faucon à l'Université'', Eve Belisle situe en 2007 sa première observation des faucons pèlerins à l'Université de Montréal.
 

Tentative de nidification en 2012  et dortoir

En 2012 c'est à l'Oratoire Saint-Joseph que Roger et Spirit ont tenté de nicher après que leur nichoir ait été retiré de la tour de l'Université de Montréal en raison de travaux. Pourtant un nichoir de remplacement avait été placé sur un autre point élevé de l'Université de Montréal.  C'est cette nidification à l'Oratoire Saint-Joseph qui a éveillé mon intérêt pour les faucons pèlerins. Quelques mois plus tard je découvrais que Spirit utilisait l'Oratoire Saint-Joseph comme dortoir.

Premières visites d'un nid de corbeau à l'été 2014

Puis en juin 2014 j'observe pour la première fois un faucon pèlerin (Spirit) dans un nid de corbeau.  Intrigué, je me mets à surveiller le nid. Le 3 juillet les 2 adultes et un fauconneau séjournent à tour de rôle dans le nid. Ce nid était situé sur la façade opposée à celle des nids actuels, c'est-à-dire sur la façade sud-ouest. Il a été retiré quelques semaines plus tard par l'Oratoire Saint-Joseph, probablement parce qu'il se trouvait au-dessus d'un endroit passant (risque qu'un visiteur reçoive sur la tête une partie du nid).
 
En janvier 2015, Spirit et Eole chassent un pygargue à tête blanche de l'Oratoire Saint-Joseph. Voir cet article
 

Premières visites des nids actuels à l'été 2018

Le 24 juillet 2018, Eve visite successivement les 2 nids de la façade Nord-Est (la façade où se trouve le nid actuel). D'après les observations d'Eve Belisle avec la caméra du nichoir un 2ième faucon était présent dans un des nids. Voir cet article pour plus de détails. Cette observation et celles des jours suivants m'ont amené à publier un article où j'examinais la possibilité d'une nidification à l'Oratoire Saint-Joseph.
 
Eve dans le nid de droite, 24 juillet 2018
Eve dans le nid de droite, 24 juillet 2018

Les faucons ont continué de séjourner à l'Oratoire Saint-Joseph jusqu'au 9 octobre au moins. Les 4 et 5 octobre un faucon (apparemment Eve) était présent après le coucher du soleil à un endroit propice pour passer la nuit.
 

Première observation des faucons dans les nids de corbeau en période de nidification: fin mars 2019

Le 29 mars 2019 je remarque depuis l'Université de Montréal ce qui semble être un faucon pèlerin dans le nid de corbeau de la corniche droite. Il n'y est plus à mon arrivée mais je constate la présence d'un faucon bagué (donc probablement Eole)  sur la croix du lanterneau, qui a lancé des attaques spectaculaires à travers les arbres contre des corneilles. Le 31 mars les 2 faucons sont observés chacun dans un nid différent, voir cet article. Ces observations présentent un caractère inédit: jusqu'à présent les faucons avaient toujours été observés à l'Oratoire en dehors de la période de nidification (été et automne). Ce n'est désormais plus le cas puisqu'à la fin mars des œufs avaient déjà été pondus certaines années précédentes.

Le 11 mars 2020 j'observais de nouveau un faucon pèlerin dans le nid de la corniche droite, voir cette publication Facebook.  Les restrictions de déplacement liées à la Covid-19 m'ont empêché de faire d'autres observations.


Ce qui s'est passé en 2020

Changement de mâle

Le 5 avril 2020 vers 9h Éole - le faucon pèlerin mâle qui était présent à l'Université de Montréal depuis l'automne 2014 (avec des absences en 2015 et 2016) -  est observé pour la dernière fois au nichoir. Le 6 avril peu après 8h un nouveau mâle - surnommé par la suite Sphinx - rend visite à Eve, alors dans le nichoir. Le 7 avril à 18h30 Eve pond son premier œuf. Voir cet article pour plus de détails.
 

L'infestation de mouches

Pour la première fois depuis que des faucons pèlerins nichent sur la tour de l'Université de Montréal (2009), une infestation de mouches a frappé les fauconneaux et a probablement joué un rôle important dans le décès de l'un d'eux. Ces petites mouches ont la particularité de se nourrir du sang de leurs victimes. Sur l'avis de spécialistes une opération de sauvetage a été décidée visant à soigner et à traiter les fauconneaux. Le 28 mai vers 7h30 les 3 fauconneaux ont été retirés du nichoir et amenés à la Clinique des oiseaux de proie. Un des fauconneaux était déjà mort, les 2 autres ont été nettoyés et traités.  Les 2 fauconneaux survivants ont ensuite été remis dans le nichoir vers 13h30. Une seconde intervention a eu lieu le lendemain pour administrer un second traitement. On ignore quand exactement le fauconneau est décédé mais il était encore vivant la veille à 19h. Voir cet article pour plus de détails. Cette infestation est considérée comme une cause possible du déménagement des faucons (article de Radio-Canada International du 4 mai, publication Facebook de Faucons de l'UdeM du 13 juillet).

Des dérangements humains plus nombreux que d'habitude au niveau du nichoir

Dans une année normale, les seuls dérangements sont au moment du baguage: d'abord la capture des fauconneaux, puis leur remise dans le nichoir. En 2020 il y a eu d'autres dérangements: réinstallation de la caméra du nichoir, interventions médicales suite à une infestation de mouches, irruption de 2 pompiers (!), porte qui s'ouvrait toute seule.
  • Réinstallation de la caméra du nichoir le 21 février après des réparations. La publication Facebook de Faucons de l'UdeM mentionne qu'Eve était très agressive durant l'intervention.
  • Infestation de mouches. Le 27 mai les photos prises par la caméra du nichoir montrent de minuscules insectes qui grouillent sur le corps des fauconneaux. L'intervention médicale qui a suivi a nécessité 4 accès au nichoir, voir cet article pour plus de détails:
    • 28 mai vers 7h30: capture des 2 fauconneaux survivants et récupération du cadavre du 3ième. Eve Belisle a conduit les fauconneaux à la Clinique des oiseaux de proie afin d'être examinés et traités.
    • 28 mai vers 13h30: remise des 2 fauconneaux survivants dans le nichoir.
    • 29 mai vers 13h45: capture des 2 fauconneaux pour un second traitement, cette fois à l'intérieur de la tour.
    • 29 mai vers 14h: remise des 2 fauconneaux dans le nichoir. 
  • Baguage. Il a eu lieu le 16 juin, avec également un 3ième traitement des fauconneaux contre les insectes, voir cet article pour plus de détails.
    • 16 juin à 15h36: capture des fauconneaux
    • 16 juin à 16h06: remise des fauconneaux dans le nichoir.
  • 2 pompiers ouvrent la porte donnant sur la tour près du nichoir le 21 juin  à 20h16, voir cette publication Facebook.
  • Problème récurrent de porte qui s'ouvre tout seule près du nichoir.

Mentionnons aussi un gros bruit enregistré par la caméra à 21h03 le 19 mai 2020 qui a provoqué un départ précipité du faucon au nid. À ma connaissance la nature du bruit n'a pas été identifiée. Cet incident a été porté à notre connaissance par quelqu'un qui l'a signalé sur le chat de la caméra. On ignore s'il y a eu d'autres incidents de ce type, peu de gens écoutant le son de la caméra une fois la nuit tombée.


Modifications au nichoir

Suite au problème d'infestations de mouches, le nichoir a été désinfecté à l'automne et les cailloux ont été remplacés (par des cailloux plus gros selon cette publication Facebook de Faucons de l'UdeM). Se pourrait-il qu'il ait eu quelque chose dans ces modifications qui ait déplu aux faucons ? On peut penser en premier lieu à l'odeur du produit utilisé pour la désinfection.  À quelques exception près, jusqu'à tout récemment les oiseaux en général n'étaient pas connus pour leur odorat mais une recherche publiée le 28 juin de cette année suggère que l'odorat pourrait jouer un rôle plus important que pensé jusqu'à là (article du Soleil du 18 juillet 2021).  Comme le nichoir se trouve à l'air libre, l'odeur du produit désinfectant avait cependant largement le temps de se dissiper. Quant au changement de cailloux, les nombreux creusages de cuvette par le mâle suggèrent que ce n'était pas un problème. 

 

Ce qui s'est passé cette année

Des accouplements qui se sont faits attendre

Alors que les premiers accouplements étaient généralement observés à la fin février - début mars ces 3 dernières années, cette saison il a fallu attendre le 27 mars pour voir un premier accouplement.

L'accouplement du 27 mars a été observé à l'Oratoire Saint-Joseph en fin de journée. Il suivait un quasi-accouplement le 25 mars à l'Université de Montréal. Voir cet article pour plus de détails.

Il est bien sur possible que des accouplements aient eu lieu plus tôt loin des regards. Mais il est aussi possible que les accouplements étaient vraiment plus tardifs. Il faut rappeler qu'il y a eu un changement de mâle par rapport aux années précédentes (Sphinx est apparu le 6 avril 2020), on ne peut pas exclure que ce mâle commence à s'accoupler plus tardivement que les précédents.  Des images prises par la caméra de Faucons de l'UdeM suggèrent que Eve était prête à s'accoupler beaucoup plus tôt.

Ce retard des accouplements pourrait avoir retardé le début de la saison de nidification. Chez les faucons pèlerins comme chez d'autres espèces d'oiseaux, les organes sexuels sont atrophiés en dehors de la saison de nidification et se développent en vue de la nidification sous l'influence d'hormones. Ces hormones incitent les oiseaux à s'accoupler. Mais l'inverse est peut-être aussi vrai: s'accoupler stimule possiblement le développement du système reproducteur ainsi que les comportements liés à la nidification. Si cela est vrai, la présence des faucons à l'Oratoire Saint-Joseph en mars n'était pas nécessairement liée à la nidification mais s'approcherait plus des présences que l'on voyait à l'été. À titre d'exemple à plusieurs reprises des corneilles ou des urubus étaient passés à proximité des nids sans provoquer d'attaque. Ces attaques ont été observées bien plus tard.

 

Présence accrue à l'Oratoire Saint-Joseph ?

Que les faucons étaient en vacances à l'Oratoire Saint-Joseph ou qu'ils se préparaient à y nicher, il semble qu'ils y étaient davantage présents que les années précédentes. Cette impression a toutefois pu être créée ou renforcée par une plus grande attention apportée à l'Oratoire Saint-Joseph par la caméra du nichoir (si le faucon présent à l'Université de Montréal fréquentait moins les perchoirs visibles par la caméra que les autres années, celle-ci a pu être tourné davantage vers les nids de l'Oratoire, mettant ainsi davantage l'accent sur les activités à cet endroit) et par davantage d'observations sur place. Ma première observation certaine d'un faucon pèlerin dans un nid de l'Oratoire date du 8 mars (également observé par la caméra de Faucons de l'UdeM) mais une photo du 20 février pourrait déjà montrer un faucon dans le nid de droite.

 

Intrusion d'Amanda et retour partiel à l'Université de Montréal

Les 25 et 29 mars 2021 une femelle faucon pèlerin baguée - Amanda - visite le nichoir de l'Université de Montréal au grand déplaisir d'Eve qui s'empresse de la chasser. Possiblement en réaction à ces intrusions, Eve et Sphinx semblent davantage présents à l'Université de Montréal, bien que la caméra continue d'observer de l'activité aux nids de l'Oratoire. Le 7 avril on observe une cassure brutale par rapport aux jours précédents: à l'exception d'une visite éclair de Sphinx dans le nichoir à 10h51 et les cris habituels très tôt le matin, les caméras n'enregistrent aucun signe de présence des faucon à l'Université de Montréal. Et le lendemain et les jours suivants aucun signe n'est observé. Pour plus de détails sur les incursions d'Amanda et sur la présence d'Eve et Sphinx à l'Université de Montréal, voir cet article.
 
Dans une publication datée du 11 avril 2021 dans le forum BCAW, bev, qui s'occupe de plusieurs nids de faucon pèlerin en Alberta, propose, pour expliquer le déménagement à l'Oratoire qu'Eve s'est peut-être sentie menacée par Amanda. Et d'ajouter qu'elle avait observé cela à un de leurs sites: ''there was too much , not so good traffic around nest box and a fight so our female moved , for a year to another area not far away. but they did bring youngster to nestbox ledge when it could fly.''. La présence insistante d'une jeune femelle à l'incinérateur des Carrières en 2015 avait été considérée comme une explication possible pour le déménagement d'Eve à l'église Saint-Marc. 
 
Pour être complet, je mentionne qu'un grand-duc d'Amérique a fait l'objet de 4 signalements distincts sur eBird le 30 mars 2021 dans les cimetières Notre-Dame-des-Neiges et Mont-Royal. 

 

Travaux sur le toit du 10ième étage sous le nichoir

Cette année, contrairement aux années précédentes, des travaux de toiture ont été effectués au 10ième étage, sous le nichoir qui est situé au 23ième étage. Ces travaux impliquaient la présence d'ouvriers mais aussi l'utilisation d'une grue mobile dotée d'une flèche télescopique comme le montre la photo ci-dessous:

Eve Belisle avait tenté sans succès de faire déplacer ces travaux en-dehors de la période de nidification mais en même temps il n'y avait pas de grande inquiétude puisque les travaux se déroulaient nettement plus bas que le nichoir. Mais puisque les faucons n'ont pas niché à l'Université de Montréal il me parait difficile d'exclure a priori que ces travaux aient pu contribuer à la décision de déménager.

Dans sa publication Facebook Faucons de l'UdeM exclut que ces travaux aient pu contribuer au déménagement puisque ''les travaux étaient suffisamment loin du nichoir, et ont débuté après le départ des faucons vers l'Oratoire''. Le premier argument est discutable puisqu'un dérangement même faible aurait pu s'ajouter à d'autres facteurs pour mener au déménagement; je discuterai donc davantage du 2ième argument qui semble a priori le plus fort. D'après Eve Belisle les travaux étaient supposés commencer le 6 avril, elle a donc porté une attention particulière au toit grâce à la caméra du nichoir: le 6 avril personne n'a été vu sur le toit, le 7 il y avait des gens sur le toit et les travaux ont vraiment commencé le 8. Quant aux faucons pèlerins, ils ont été vus pour la dernière fois à l'Université de Montréal le 6 avril (le 7 avril il n'y a eu qu'une visite éclair de Sphinx). Quelques remarques:
  • Le 2 avril j'avais signalé à la Sécurité de l'Université de Montréal un individu qui se trouvait sur le toit du 10ième étage et qui n'était manifestement pas un employé.  De mémoire, le lendemain la caméra du nichoir a montré plusieurs employés qui montaient sur le toit du 10ième. Je m'en souviens puisque l'idée a brièvement émergé qu'ils cherchaient peut-être l'intrus de la veille! Les travaux par la firme externe ont commencé le 8 avril mais il y a pu y avoir des travaux préparatoires par des employés de l'Université de Montréal avant.
  • Le fait que les faucons ont été vus pour la dernière fois le 6 avril ne signifie pas qu'ils n'étaient pas présents à l'Université de Montréal ultérieurement puisque des perchoirs couramment utilisés ne sont pas visibles par les caméras. Ils pouvaient aussi passer en vol.
  • Dans la mesure où le premier œuf semble avoir été pondu seulement après le 15 avril (voir plus bas),  les faucons disposaient de plusieurs jours pour faire un ultime retour à l'Université de Montréal, ce qu'ils n'ont pas fait. Or les travaux étaient en cours du 8 au 15 avril.
Ces remarques montrent qu'on ne peut pas affirmer que ces travaux n'ont joué aucun rôle dans la décision de déménager (bien entendu on ne peut pas non plus affirmer qu'ils ont joué un rôle).

6 avril, dernier jour de présence substantielle à l'Université de Montréal: Sphinx nargue Eve, cris d'alarme

Le 6 avril est le dernier jour où Sphinx et Eve sont observés tous les deux à l'Université de Montréal par la caméra du nichoir avant la ponte à l'Oratoire Saint-Joseph. La dernière vidéo publiée par Faucons de l'UdeM montre une scène assez particulière qui pourrait possiblement donner un aperçu sur la dynamique de ce couple. À 10h40 Eve est dans le nichoir quand Sphinx se pose à droite du nichoir avec une proie. Eve se précipite vers lui pour prendre possession de la proie mais Sphinx décolle avec au dernier moment! Il semble ensuite que Sphinx continue de parader en vol avec la proie. Ce sont probablement ces manœuvres qui incitent Eve à traverser toute la corniche pour se rendre à gauche du nichoir. Sphinx se rend alors au nichoir avec la proie. Eve se précipite au nichoir mais à nouveau Sphinx s'envole avec la proie! La vidéo s'arrête là. D'après les notes d'Huguette Lenoir les 2 faucons sont ensuite revus à 10h51. Rappelons que chez les faucons pèlerins la femelle est plus grosse que le mâle, on a donc tendance à penser que c'est elle qui mène dans le couple. Mais cette scène montre que Sphinx n'hésite pas à narguer Eve. Si Sphinx a un rôle plus dominant dans le couple qu'on le pensait, il a aussi pu jouer un rôle plus important qu'on le soupçonnait dans le choix du nid. Or c'était la première saison où il avait vraiment son mot à dire puisqu'en 2020 il était apparu la veille de la ponte du 1er œuf. 

À 13h33 et à 18h14 les notes d'Huguette Lenoir indiquent des cris d'alarme attribués à Sphinx. Il n'y avait pas de mention de cri d'alarme les 4 et 5 avril. Dans la mesure où ces cris d'alarme précèdent de peu le départ des faucons de l'Université de Montréal, il serait intéressant de savoir ce qui les a causé: si par exemple ces cris avaient été provoqués par une présence humaine près du nichoir, une telle intrusion aurait en effet pu être un facteur déterminant du déménagement. On ignore ce qui a causé les alarmes mais les notes d'Huguette Lenoir indiquent que Sphinx était dans le nichoir de 17h40 à 19h13, ce qui suggère que la 2ième alarme n'était pas très sérieuse, possiblement des urubus qui s'aventuraient trop près de la tour.

Ponte, naissance et envol à l'Oratoire Saint-Joseph

Les 23 et 24 avril j'observe pour la première fois des relais à l'un des anciens nids de corbeau de l'Oratoire Saint-Joseph, signe que l'incubation a commencé (Huguette Lenoir, en se basant sur les images de la caméra, considère que l'incubation a commencé le 22 avril). Le 27 mai j'observe un nourrissage, signe qu'au moins un fauconneau est né. Les 2 fauconneaux - un mâle et une femelle - effectuent leur premier vol respectivement les 2 et 6 juillet

Le déménagement du couple de faucon pèlerin est en quelque sorte confirmé lors de la ponte du 1er œuf. Il serait donc intéressant de savoir quand ce premier œuf a été pondu. Malheureusement comme on ne peut pas voir ce qui se passe dans le nid, on ne peut qu'estimer cette date. Il y a plusieurs façons d'estimer la date de la ponte du 1er œuf:
  • A partir du début de l'incubation. L'incubation commence généralement après la ponte de l'avant-dernier œuf et il s'écoule environ 52 heures entre la ponte de 2 œufs. Malheureusement on ignore combien d’œufs ont été pondus si ce n'est que ce nombre est au moins 2. En faisant l'hypothèse généreuse qu'il y a eu 4 œufs et que l'incubation a commencé le 22 avril à midi, cela nous amène à la date du 18 avril pour la ponte du 1er œuf (si on avait supposé moins d’œufs ou que l'incubation avait commencé plus tard, on aurait obtenu une date de ponte plus tardive).
  • A partir de la date des naissances. La durée de l'incubation chez le faucon pèlerin varie entre 32 et 35 jours. En supposant que la première naissance date du 27 mai (moment de l'observation du premier nourrissage) et en prenant le 35 jours, on obtient un estimé pour le début de l'incubation au 22 avril, ce qui colle avec l'hypothèse faite dans le point précédent (si on avait utilisé moins que 35 jours pour la durée de l'incubation, on aurait obtenu une date de début d'incubation plus tardive et donc une date de début de ponte plus tardive).
  • A partir de la date du 1er vol du mâle. En 2019 le 1er œuf avait été pondu le 11 avril et le premier vol d'un mâle avait eu lieu le 26 juin. Cette année le 1er vol d'un mâle a eu lieu le 2 juillet, ce qui donnerait la date du 17 avril pour la ponte du 1er œuf (je n'ai pas utilisé les données de 2020 puisque les difficultés lors de l'incubation auraient pu causer un retard dans le développement des fauconneaux; par ailleurs il n'y avait pas de mâle).

Les calculs précédents comportent une part d'incertitude mais on peut penser que le premier œuf a été pondu après le 15 avril.


Autres facteurs possibles

Changement dans la composition du couple ?

Dans la mesure où ni Eve ni Sphinx ne sont bagués, chacun des deux pourrait théoriquement avoir été remplacé par un autre individu sans qu'on le remarque. Si le nouveau venu ressemble à l'ancien ce changement pourrait en effet être très difficile à détecter. Il est à noter que les chances de détecter un éventuel changement sont plus élevés pour la femelle puisque celle-ci possède des cicatrices au bec (je fais confiance aux personnes qui affirment reconnaitre Eve pour la comparaison des cicatrices), alors que Sphinx ne possède pas à ma connaissance de signe particulier. En cas de changement dans la composition du couple il devrait normalement y avoir une période de transition au cours de laquelle les 2 faucons s'habituent l'un à l'autre. Dans cet article je mentionne des observations de l'automne 2020 qui pourraient correspondre à une telle période de transition mais ces observations pourraient tout aussi bien avoir d'autres explications. Un changement dans la composition du couple pourrait aussi se traduire par des changements dans les comportements des faucons, par exemple l'utilisation de nouveaux perchoirs. Mais ceci nous amène au point suivant:

Dans la mesure où Sphinx est apparu le 6 avril 2020, il peut être considéré lui-même comme un nouveau mâle pour les fins de la nidification. En effet pour la saison 2020 il n'a pas eu son mot à dire dans le choix du nid puisque Eve a pondu son premier œuf dans le nichoir le lendemain de son apparition. Et on ne connait rien de ses habitudes en février-mars-avril puisqu'il n'avait pas encore passé une année entière à l'Université. Pour cette raison la question de savoir si Sphinx a été remplacé ou non par un autre mâle me parait peu pertinente pour expliquer le déménagement. 
 
Un changement de femelle serait davantage susceptible d'expliquer le déménagement après 3 nidifications consécutives à l'Université de Montréal. Mais cet argument serait plus convaincant si Eve n'avait pas un historique de changements de nid (voir plus haut). De plus un changement de femelle aurait plus de difficultés à passer inaperçu à cause des cicatrices d'Eve.

Les préférences des faucons

Eole a remplacé successivement 3 mâles en 2014, 2015 et 2016 à l'Université de Montréal. Même si ignore s'il a du employer la force, cela montre à mon avis son attachement au nichoir de l'Université de Montréal. Un attachement qui pourrait s'expliquer en partie par le fait qu'il était lui-même né dans ce nichoir.

De son côté on peut penser qu'Eve a conquis l'Université de Montréal principalement pour rejoindre Eole, son partenaire de l'incinérateur des Carrières. Le fait qu'elle n'est pas baguée indique qu'elle n'a pas vécu l'expérience du baguage alors qu'elle était juvénile et suggère qu'elle est née dans un autre type de nid qu'un nichoir. On peut donc penser qu'elle appréciait peut-être moins le nichoir qu'Eole (mais elle y a quand même niché 3 années de suite: sous l'influence d'Eole ?)

Sphinx est également non bagué, ce qui suggère qu'il n'est peut-être pas né lui non plus dans un nid ressemblant au nichoir de l'Université de Montréal.

L'Oratoire Saint-Joseph et la tour de l'Université de Montréal ont en commun d'être des structures construites par l'homme. Mais l'Oratoire est bien plus proche de la nature (arbre tout près du nid, jardin, ...) que la tour de l'Université de Montréal. On ignore où Eve et Sphinx sont nés mais on ne peut pas totalement exclure que les nids de l'Oratoire Saint-Joseph ressemblaient davantage à leurs nids natals que le nichoir de la tour de l'Université de Montréal.

Qualité des sites et caractère des faucons

On a tendance à penser que le nichoir de la tour de l'Université de Montréal est un site de bien meilleure qualité que celui de l'Oratoire Saint-Joseph (en hauteur, vue dégagée, loin des activités humaines, correctement orienté,...). Mais nous sommes des humains et non des faucons pèlerins: peut-être que les faucons pèlerins ont une appréciation différente.

Mais supposons que le site de l'Université de Montréal est vraiment meilleur que le site de l'Oratoire même du point de vue des faucons. Logiquement le site de l'Université de Montréal devrait alors susciter davantage de convoitise par d'autres faucons, ce qui implique davantage de stress causé par la nécessité de chasser les nombreux intrus.
 
Dépendamment de leur caractère, certains faucons pourraient préférer un site de moins bonne qualité mais plus tranquille.
 
Si c'était un facteur dans la décision de Sphinx et Eve de déménager, la bonne nouvelle pour ceux/celles qui souhaitent les voir revenir à l'Université de Montréal, c'est que les faucons ont pu constater qu'il y avait aussi des intrusions d'autres faucons pèlerins à l'Oratoire Saint-Joseph!

Ras le bol d'être espionné par les caméras

Pour expliquer le déménagement, certains ont proposé à la blague que Sphinx et Eve en avaient peut-être marre de la téléréalité dont ils sont l'objet! Au-delà de la plaisanterie, la surveillance par les caméras, pourrait-elle être un facteur ?
 
La seule caméra qui pourrait potentiellement déranger les faucons est celle du nichoir.  On a vu des faucons visiblement intrigués par les mouvements de cette caméra derrière le globe mais ils finissaient toujours par s'en désintéresser.. Sauf peut-être le 13 mars 2020 lorsqu'un mouvement de la caméra après le coucher du soleil a semblé provoquer le départ d'Eve.
 
Le fait qu'Eve et Sphinx continuent de visiter le nichoir le jour mais sans y nicher suggèrent que si la caméra était en cause, le problème surviendrait plutôt durant la nuit. La caméra fonctionne en mode différent le jour et la nuit mais c'était le cas déjà en 2018, 2019 et 2020, années où les faucons ont niché dans le nichoir. Signalons toutefois que la caméra a été réparée en février 2020. D'après Eve Belisle cette caméra n'émet ni bruit ni lumière (même pas en infrarouge) dans le cadre de son fonctionnement normal. 

Une chose qui aurait pu irriter les faucons, ce sont des mouvements de la caméra durant la nuit. Comme mentionné plus haut les faucons remarquent les mouvements de la caméra le jour mais ils pourraient aussi le remarquer la nuit par la réflexion de la lumière ambiante sur une partie mobile. Et on peut imaginer que des mouvements furtifs la nuit près du nichoir soient plus anxiogènes que le jour. Rien n'indique que la caméra ait été bougée la nuit durant la période de nidification, ou que si cela a été fait, que ça l'ait été plus que les années précédentes. Il y a eu un incident connu où la caméra a bougé toute seule vers 21h30 après avoir été réglée par erreur sur l'autotrack mais c'était le 27 novembre 2020, donc bien après la période de nidification.


Distanciation par rapport à un hypothétique autre nid de faucon pèlerin

Ce facteur est particulièrement spéculatif à ce stade mais je le mentionne pour être complet. Si un autre couple de faucon pèlerin s'était installé non loin de l'Université de Montréal, Eve et Sphinx pourraient avoir voulu mettre plus de distance entre leur nid et ce nouveau nid. Selon ce raisonnement l'hypothétique nouveau nid serait situé à l'opposé de l'Oratoire, donc dans la direction de l’École Polytechnique. Il n'y a pour l'instant rien de solide qui appuie l'hypothèse d'un autre nid près de l'Université de Montréal.  Je mentionnerai toutefois les 2 observations suivantes:
  •  Le 10 juillet 2020, un faucon pèlerin juvénile mâle venu d'un nid inconnu a visité les 2 femelles juvéniles de l'Université de Montréal qui venaient tout juste d'apprendre à remonter sur la tour, voir cet article. Basé sur le stade de développement des juvéniles de l'Université de Montréal, on serait tenté de conclure que le nid de ce juvénile mâle n'était pas loin mais il faut tenir compte que les mâles apprennent à voler quelques jours plus tôt que les femelles et que ce mâle était peut-être né 2 ou 3 semaines plus tôt.
  • Le 10 juillet 2021 j'observe 3 faucons en vol au-dessus du terrain de sport Vincent d'Indy. Un faucon émerillon perché sur un mat d'éclairage du CEPSUM les observait mais il n'est pas parti les rejoindre et ceux en vol ne l'ont pas rejoint. J'ignore si ceux en vol étaient des faucons émerillons ou des faucons pèlerins. L'observation simultanée des faucons pèlerins juvéniles à l'Oratoire Saint-Joseph par un autre observateur semble exclure qu'il s'agissait de ces juvéniles. Si c'était des faucons pèlerins il pouvait s'agir d'Eve, de Sphinx et de la jeune femelle Kelly qui avait été relâchée quelques jours plus tôt à l'Oratoire Saint-Joseph mais je trouverais un peu étonnant qu'Eve et Sphinx volent ensemble et pacifiquement avec Kelly en laissant leurs propres jeunes seuls. Voir cet article pour plus de détails.
 
Incidemment le couple connu de faucon pèlerin le plus proche de l'Université de Montréal est celui de Polly à l'église River's Edge, à 3,25kms. Avec le déménagement de Sphinx et Eve à l'Oratoire, cette distance a été réduite à 2,10kms mais le site de l'église River's Edge ne semble pas avoir été utilisé en 2020 et en 2021. On ignore si Polly a niché durant ces 2 années, et si oui, où. Notons que l'argument pourrait aussi être inversé: si les faucons pèlerins de l'Université de Montréal n'ont pas déménagé plus tôt à l'Oratoire Saint-Joseph, c'était peut-être puisqu'ils se seraient trouvés trop près du nid de Polly.

 

Conclusion

Dans cet article j'ai rassemblé différents faits et émis différentes hypothèses susceptibles d'éclairer le déménagement des faucons pèlerins de l'Université de Montréal à l'Oratoire Saint-Joseph. Si vous avez d'autres idées n'hésitez pas à les partager, par exemple en commentant cet article (je me réserve le droit d'effacer les commentaires qui ne sont pas sérieux). Mais à défaut de pouvoir interroger Eve et Sphinx sur leurs motivations on ne saura jamais avec certitude la raison réelle de ce déménagement.
 
Ce qui suit est d'ordre plus spéculatif.
 
En 2020 Sphinx et Eve ont du faire face quasi-simultanément à 2 ennemis qui ont causé la perte d'un fauconneau:  les mouches suceuses de sang et les humains. À propos de ces derniers: ''Les prédateurs humains s’essaient chaque année. Jusqu’à présent ils arrivaient toujours quand nos jeunes étaient déjà grands et forts et tous ensemble on arrivait à les chasser. Mais cette année ils sont venus quelques jours après les naissances et ont réussi à s’emparer de notre plus jeune [soupir] . Ils sont revenus 2 autres fois pour tenter d’attraper les 2 autres mais heureusement nous avons de nouveau réussi à les mettre en fuite '' (propos fictifs attribués à Ève, la femelle faucon pèlerin). Les adultes étaient totalement impuissants face à ces 2 agressions, ce qui implique que chacune d'elle pouvait se répéter l'année suivante avec le même résultat, voire pire, s'ils renichaient au même endroit. J'ignore ce qui incite les faucons à déménager sur un site alternatif lorsqu'ils en ont un à leur disposition mais il me semble qu'ils avaient là une excellente raison pour le faire!

L'apparent retour des faucons à l'Université de Montréal fin mars - début avril est quelque peu intrigant: pourquoi ce retour si leur instinct les poussait à déménager? D'abord je ne suis pas persuadé que c'était vraiment un retour dans la mesure où les faucons continuaient de fréquenter l'Oratoire durant cette période. Je pense plutôt qu'ils occupaient l'Université de Montréal pour empêcher que d'autres faucons pèlerins (en premier lieu Amanda) s'y installent. Mais on ne peut pas exclure que malgré ce qui est arrivé en 2020 ils avaient décidé de nicher à nouveau à l'Université de Montréal et qu'un évènement les a fait changer d'avis début avril.

Plus haut j'ai qualifié les humains d'ennemis, d'agresseurs et de prédateurs: j'adoptais évidemment le point de vue que je pense être celui des faucons pèlerins! Je continue d'appuyer totalement l'opération de sauvetage  ainsi que le baguage. Avec le recul (c'est facile plusieurs mois plus tard!) je pense néanmoins qu'une erreur a peut-être été faite: celle de ne pas avoir laisser les faucons s'occuper du cadavre du fauconneau. Comme la mort est survenue durant la nuit et que le cadavre a été retiré à 7h30, les adultes n'avaient pratiquement aucune chance d'assimiler l'information de la mort du fauconneau (le fait de sauter un repas n'est évidemment pas normal mais n'est sans doute pas synonyme de mort chez les faucons pèlerins). Si les faucons n'ont pas réalisé que le fauconneau était mort, la conclusion est simple: c'est l'humain qui est responsable de sa perte...  Laisser le cadavre du fauconneau dans le nichoir n'aurait cependant pas été une décision facile. D'abord cette décision aurait vraisemblablement choqué de nombreuses personnes et suscité un tollé. Ensuite il n'est pas certain que les faucons n'auraient pas quand même attribué la mort aux humains et/ou n'auraient pas déménagé l'année suivante.

En terminant mon souhait est que les faucons pèlerins choisissent de nicher à nouveau à l'Université de Montréal dans les années à venir, et non qu'ils y soient obligés suite à la destruction de leurs autres options. Il n'est pas clair si les faucons pèlerins pourront de nouveau nicher en 2022 à l'Oratoire Saint-Joseph en raison des travaux en hauteur qui y sont prévus. Mais si la décision est prise d’empêcher les faucons de nicher à nouveau à l'Oratoire Saint-Joseph en 2022, j'ai suggéré que ce soit par une méthode non destructive (par exemple en interdisant par un filet l'accès à la façade) plutôt que destructive (destruction des nids), de façon à ce que les faucons puissent exercer leur choix lorsque les travaux seront terminés.